En
1941, le Levant (alors sous mandat confié à la France
par la SDN) était alors sous l'autorité du gouvernement
de Vichy.
A cette époque, le Levant suscitait l'intérêt de
plusieurs pays. Les Allemands pensaient que le contrôle de ces
territoires étaient un atout majeur pour eux. En effet, ils pouvaient
ainsi avoir accès au pipe-line amenant le pétrole irakien
et pouvaient intervenir contre l'armée britannique engagée
en Egypte et plus particulièrement sur le canal de Suez. Ils
pouvaient, de plus, intervenir en Russie ou en Inde, où se construisaient
les usines nécessaires à l'effort de guerre des Britanniques.
Les Britanniques, quant à eux, n'avaient jamais accepté
la présence de la France dans leur "pré carré".
Enfin, les Français libres du général de
Gaulle souhaitaient faire rentrer ces territoires dans la guerre.
A cette fin, le général Catroux, est nommé délégué
du général de Gaulle pour le Moyen-Orient en 1941. La
1ère division légère de la France Libre est alors
formée. Le général Legentilhomme qui la commande
réussit à rassembler 4 500 hommes.
A Vichy, l’amiral Darlan qui arrive au pouvoir le 9 février
1941 s’efforce de relancer la politique de collaboration. La situation
va devenir explosive lors du coup d’état anti-britannique
qui intervient en Irak le 1er avril 1941, fomenté par Rachid
Ali avec l’appui des services allemands. A cette date, l’Irak
a recouvré son indépendance. Le nord de l’Irak avec
les champs de pétrole de Kirkouk passait ainsi sous le contrôle
des troupes de Rachid Ali qui coupèrent le pipe line en direction
de Haïfa (Palestine) au profit de celui en direction de Tripoli,
en Syrie (fermé depuis l’armistice). Darlan, conformément
à sa politique de collaboration, va accorder un soutien technique
aux avions de la Luftwaffe transitant par les aérodromes de Syrie
en direction de l’Irak et de l’Iran.
Poursuivant leur expansion, les Allemands prennent la Grèce en
avril 1941 suivi de la Crète en mai, quelques jours avant l'attaque
de l'URSS. La menace contre le canal de Suez se précisant, les
Britanniques devaient réagir.
Darlan, renforçant sa politique d’ouverture vers l’Allemagne,
signa des accords prévoyant une assistance technique aux avions
allemands sur les aérodromes français de Syrie ainsi que
la mise à disposition de Bizerte et de la voie ferrée
du sud tunisien au profit des forces de l’axe. Enfin, la France
s'engageait à assurer la protection de la navigation des forces
de l’axe entre Toulon et Bizerte.
En Irak, les troupes britanniques, ayant maté la rébellion
de Rachid Ali attaquaient les forces françaises en Syrie et au
Liban le 8 juin 1941 avec une force de 20 000 hommes.
Le général Dentz, le haut-commissaire et commandant en
chef en Syrie et au Liban engagea immédiatement ses 30 000 hommes
(tous soldats de métier) contre les assaillants.
Le général Wilson, le commandant de l'opération,
confia les opérations terrestres au général australien
Lavarack.
Celui ci partagea ses forces en 2 groupes. L'un, Australien devait opérer
au Liban. L'autre, Franco-Britannique (1ère DFL et 5ème
brigade indienne) devait opérer en Syrie. Le premier objectif
était la route Damas - Beyrouth et le deuxième était
la route Homs - Tripoli. Dans un deuxième temps, une action dans
la région de Pamyre, à partir de l'Irak, était
envisagée.
La 7ème division australienne (25ème et 21ème brigade)
s'engage donc sur l'axe allant de Metoulla - Merjouyoun à Rayak
et sur l'autre, longeant la côte, conduisant à Beyrouth.
La progression est ralentie par le terrain accidenté. La 21ème
brigade, retardée par les destructions et la résistance
des Français prend Tyr et atteint le fleuve Litani à Kyndié
le 8 juin.
Le 9, les tirailleurs algériens, attaqués par les Australiens,
résistent. La Royal Navy, malgré la forte riposte de la
marine française, pilonne les positions françaises. Le
10, les positions françaises sont enlevées (les Britanniquess
perdirent un destroyer).
La 25ème brigade progresse vers Merjouyoun en rencontrant les
mêmes difficultés. Cette ville est prise le 16 juin. L'offensive
s'arrête à Nabatieh lorsqu'une violente contre-attaque
française est déclenchée. Le 9 juillet, après
une semaine de calme entrecoupé d'escarmouches, l'attaque des
Australiens vers Beyrouth reprend. Ils percent et ne sont plus qu'à
15 kms de Beyrouth, contenus par le 6ème régiment de Légion.
Sur mer, la marine française mène également un
combat acharné. Dans la nuit du 15 au 16 juin, le contre-torpilleur
chevalier-Paul est coulé par une torpille puis ce fut le tour
du sous-marin le souffleur coulé peu après.
A l'est, l'offensive sur Damas se heurte également à une
forte résistance.
Le général Dentz attend sur cet axe l'effort principal
des Alliés. La 5ème brigade indienne doit enlever Daras
puis percer la position Koumeitra - Cheik - Meskine afin d'ouvrir la
voie à la 1ère DFL. Le 8 juin, Koumeitra est prise mais
Cheik - Meskine résiste jusqu'au 9 juin.
La 1ère DFL prend Azraa sans perte le 9. Le soir, les Français
libres sont sur la ligne Kissouré, Taïbé, Kiara-Denoum.
Le 10, la 1ère DFL prend le sommet du Djebel Maani mais est rapidement
bloqué par un bombardement aérien. La position des français
du Levant est solidement tenue, ce qui oblige la 5ème brigade
indienne à monter en ligne face à Kissoué tandis
que les Français libres consolident leur position.
Le même jour, le QG de la division est bombardé trois fois
et le général Legentilhomme est touché. La 5ème
brigade indienne parvient enfin à prendre Kissoué le 15
juin.
Pendant ce temps, le détachement Collet, flanc-garde de la 1ère
DFL progresse. Le 8 juin, il est à Fik-Khifine. Le 9, il atteint
Mesmiyé et se heurte à l'armée du Levant sur le
Nahr-el-Aouadi qu'il ne peut franchir. Subissant des contre-attaques
blindés, il doit se replier.
Le 15 juin, sur tout le front, la contre-attaque française se
déclenche : chars, auto-mitrailleuses accompagnées de
cavaliers et d’infanterie sur camions attaquent en direction de
Kouneitra et Cheik Mesquine. Le dispositif Britannique est disloqué
et dépassé, la 1ème DFL bousculée. Kouneitra
capitule et Cheik Meskine est sauvé in extrémis par l’arrivée
d’une batterie d’artillerie. Le détachement Collet
est durement touché : tous les officiers et le tiers de l'escadron
de spahis marocains sont tués ou blessés, 10 chars sur
12 sont détruits et 12 auto-mitrailleuses sur 17 sont détruites.
Le 16 au soir, la contre-attaque Française aura parcouru 110
kms, détruit une grande partie des éléments arrières
Britanniques jusqu’à Daraa, mais elle doit s’arrêter
et refluer, faute de moyens.
Du 17 au 21 juin, les Britanniques relancent l’offensive puis
ouvrent un nouveau front à partir de l’Irak.
Une nouvelle brigade est engagée dans la région de Merjouyoun
et un bataillon, venant de Crète, vient coiffer le dispositif
franco-britannique à l’est. A l’ouest, les Britanniques
sont contenus à hauteur de Damour entre Beyrouth et Sayda.
A l’est, l’offensive contre Damas est lancée. La
5ème BI est mise hors de combat sur les hauteurs de Kissoué
et est relayée par la 1ème DFL et la 13ème DBLE,
puis relevée par une brigade fraîche arrivant de Palestine.
Le 20 juin, un nouveau front est ouvert au nord-est par la Légion
Arabe de Glubb Pacha venant d’Irak et marchant sur Palmyre. Elle
sera stoppée par l’aviation et le 6ème REI qui ne
décrochera que sur ordre.
Le 21 juin, Damas tombe sans combat.
La ville tombée, la résistance des Français du
Levant diminue, les effectifs et les moyens s’amenuisent et une
partie de l’aviation ne peut prendre l'air faute de pièces
détachées.
A l’ouest, les Australiens de la 7ème division percent
à Damour, mais Beyrouth ne tombera pas. Les derniers combats
dans cette zone se livrent les 9 et 10 juillet.
A l’est, la 6ème division progresse vers Baalbek, la 1ème
DFL vers Homs, d’une part, et Ras - Baalbek, d’autre part.
La Légion arabe prend Palmyre le 3 juillet mais se trouve arrêtée
devant Fourklous. Enfin, tout à fait au nord, la 10ème
division venant d’Irak fonce vers la mer sans combat et coupe
la route à toute retraite des Français du Levant vers
la Turquie.
Le général Dentz se résout à demander un
armistice.
Celui ci est autorisé par Vichy à traiter avec les seuls
Britanniques. Des négociations ont lieu, elles se terminent par
la convention de St Jean D’acre, le 14 juillet.
Les Français ont droit aux honneurs militaires et conservent
leurs armes.
Au terme de ces combats, les pertes s'élevaient à 1 066
tués et 5 400 blessés du côtés des forces
françaises du Levant.
Les Alliés, quant à eux, perdirent en tués ou blessés,
1 600 Australiens, 1 900 Britanniques ou Indiens et 650 FFL.
La convention de Saint-Jean-d'Arc le 14 juillet mettant fin à
cette guerre donna lieu à d'intenses tractations. Sur ordre de
Vichy, les Français du Levant refusèrent de traiter avec
les FFL. De ce fait, aucune transmission de pouvoirs ne put être
échangée entre les Vichystes et les Français libres.
Le mandat sur les pays du Levant fut par conséquent remit à
la Grande-Bretagne, ainsi que le commandement des forces autochtones.
Conformément aux accords, les soldats vichystes conservaient
leurs armes individuelles et purent détruire les armes que les
Britanniques ne voulaient pas conserver.
Les soldats vichystes avaient également la possibilité
de se rallier aux armées alliées.
2 600 Européens, 1 100 Nord-Africains et 1 800 Coloniaux rejoignirent
ainsi les Français libres. Les fonctionnaires et militaires français
refusant le ralliemment furent rapatriés en France.
Fin août 1941, 37 563 Français quittaient le Levant pour
retourner en France (dont le général Dentz). Cet accord
permettant à la Grande-Bretagne d'avoir la main-mise sur le Levant
ne pouvait être accepté par le général de
Gaulle. Dès le 25 juillet 1941, celui ci signait un acte réglant
les relations franco-britanniques.
Utilisant le personnel français restant au Levant, le général
de Gaulle déclarait assumer toutes les responsabilités
du mandat et rétablir la souverainteté française
dans ces territoires.
Les Britanniques, déjà installés, durent s'incliner
devant la détermination du général de Gaulle, alors
qu'une colonne, commandée par le général Montclar,
était envoyée pour rétablir l'autorité française,
au besoin par la force.
Conformément aux ordres du général de Gaulle, aucune
décoration ni citation ne fut accordée aux soldats FFL
pour les combats livrés en Syrie.