La Guerre d'Indochine

Le coup de force d'Hô Chi Minh



Hô Chi Minh

(à gauche)

Les Japonais chassèrent les derniers Français le 9 mars 1945, après avoir massacré ou interné les militaires et confièrent le pays à l'ex-empereur d'Annam : Bao Dai.
Au moment de la capitulation japonaise, les Français avaient moins de 6 000 hommes en Asie.
Les Alliés confièrent l'occupation du Nord de l'Indochine aux Chinois et celle du Sud aux Anglais. Hô Chi Minh , Pham Van Dong et Vô Nguyen Giap, profitèrent du vide politique et administratif français pour proclamer l'indépendance de la "République Démocratique du Viêt-nam" le 2 Septembre 1945 à Hanoi, entraînant l'abdication de Bao Dai.
En réalité, à cette époque, l'autorité du gouvernement d'Hô Chi Minh ne s'exerçait que dans quelques zones "libérées" du Tonkin.


La reprise en main

Leclerc de Hautecloque

Pour reprendre pied en Indochine, la France nomma en octobre 1945 l'amiral Thierry d'Argenlieu Haut-Commissaire de la République française.
La France rétablit ainsi sa souveraineté, après la réoccupation des zones de désarmement des japonais en vertu des accords de Postdam de juillet 1945.
De plus, la France envoya en Indochine un corps expéditionnaire français commandé par le général Leclerc de Hautecloque.
Ses troupes débarquèrent en Cochinchine dès le 12 Septembre 1945.


La convention de Fontainebleau

Leclerc et Hô Chi Minh

Malgré la résistance de quelques groupes Viêt-minh, les forces du général Leclerc s'imposèrent en Cochinchine tandis que les troupes chinoises pillaient le nord du pays.
Hô Chi Minh fut ainsi contraint de s'entendre avec la France qui pouvait seule négocier le départ des Chinois.
En Mars 1946, Leclerc fut accueilli à Hanoi par Hô Chi Minh qui allait se rendre en France à la conférence de Fontainebleau pour discuter du statut du Viêt-nam.
La conférence de Fontainebleau débuta le 6 juillet 1946, mais n'aboutit pas, les problèmes de politique intérieure française empêchèrent le gouvernement de prendre sérieusement en compte les revendications des Viêtnamiens.
Le Viêt-minh, pour sa part, mettait à profit le temps qui s'écoulait pour renforcer ses troupes sous la direction de Vô Nguyên Giap, tandis que Hô Chi Minh ne dissimulait pas son impatience à obtenir une indépendance dans le sein de l'Union française.
En fait, Hô Chi Minh voulait unifier le Tonkin, l'Annam et la Cochinchine et obtenir une indépendance totale.


L'offensive Viêt-minh

Don Dang, frontière du Kouang Si et du Tonkin

Vers la fin de l'année 1946, la tension monta, Hô Chi Minh était convaincu que la France ne céderait pas à sa demande (c'est à dire l'obtention de l'indépendance dans le sein de l'Union française).
Le 19 décembre 1946, le Viêt-minh lança une attaque généralisée contre l'ensemble des postes français (en particulier à Hanoi où les combats durèrent jusqu'en février 1947).
Mais, l'armée française tint bon et le coup de force échoua.
La guerre d'Indochine commençait.


Le corps expéditionnaire français

Patrouille au Tonkin

Le Corps expéditionnaire français d'Extrême-Orient (Cefeo) se composait uniquement de soldats de métier, légionnaires (une forte proportion d'entre eux étaient d'anciens soldats de la Wehrmacht), tirailleurs nord-africains, infanterie coloniale, parachutistes, quelques unités blindées, d'artillerie et des forces aériennes.
Le Cefeo aligna à terme 250 000 hommes, auxquels il faut ajouter un nombre à peu près égal de soldats des armées du Laos, du Cambodge et du Viêt-nam. En décembre 1946, les forces viêt-minh se montaient, quant à elle, à 60 000 hommes assez bien équipés.
Les forces du viêt-minh parvinrent à réunir à la fin du conflit au moins 350 000 hommes, dont 125 000 combattants réguliers répartis dans neuf divisions, y compris une division blindée lourde.


L'opération "Léa"

Eglise fortifiée

Cette opération, déclenchée à partir du delta tonkinois avait pour but la capture d'Hô Chi Minh et de son état-major cachés dans les calcaires de Bac Kan-Nguyen Binh.
L'opération faillit réussir, le chef communiste ne réussissant à s'échapper que d'extrême justesse.
Cette opération permit toutefois aux Français de reprendre pied dans le haut Tonkin et de reprendre la route coloniale 4, qui va de la mer jusqu'à Cao Bang puis les routes coloniales 3 et 3 bis qui descendent vers le sud-est, coupant ainsi le ravitaillement viêt-minh.
L'armée française contrôlait ainsi une grande partie du pays. Cette opération fut qualifiée de succès par le général Salan, le nouveau chef du corps expéditionnaire français en Indochine, alors que la suite des événements démontra que le Viêt-minh n'était nullement désorganisé.
Le calme n'était qu'apparent, le Viêt-minh se livrait à de nombreuses attaques nocturnes de postes isolés, piégeant les pistes, torturant et se livrant à des atrocités sur les soldats français tombés vivants entre leurs mains.
De nombreux témoignages font état d'hommes retrouvés émasculés ou empalés sur les bambous...
Les Français tiennent les villes et les grandes routes, tandis que le viêt-minh mène une guérilla.
Le Viêt-minh crée aussi des zones "libérées" dans les régions d'accès difficile du Nord-Tonkin et du Nord-Annam, ou les zones marécageuses de la Plaine des Joncs et de certains territoires de la Cochinchine.
Dans ces régions, le Viêt-minh organise un régime communiste, fanatisant les jeunes et donnant les terres aux paysans.


Les accords de la baie d'Along

Bao-Daï et le ministre Jean Letourneau

La France cherchant une solution politique, trouve un interlocuteur valable avec l'ex-empereur d'Annam, Bao Daï, qui draîne une frange de nationalistes modérés.
En 1948, les accords de la Baie d'Along accordent à Bao Daï l'indépendance d'un Viêt-nam unifié (ce que les autorités françaises avaient refusées à Hô Chi Minh en 1946).
En 1949, la France signe des accords identiques avec le Cambodge et le Laos.
Ces nouveaux Etats vont ainsi disposer d'armées nationales, formées et encadrées par des Français qui représenteront, en 1954, 50% des effectifs luttant contre le Viêt-minh. Malheureusement, les forces françaises se heurtent à un ennemi Viêt-minh se renforçant de jour en jour et gagnant de plus en plus de terrain.


L'internationalisation du conflit

Patrouille dans le Haut-Tonkin

Avec la victoire communiste en chine en 1949, Le Viêt-minh disposait désormais de refuges et des bases d'entraînement en Chine.
Il reçut également une aide militaire considérable de la part de la Chine et de l'U.R.S.S.
Le général Viêt-minh Giap put alors créer de nouvelles divisions et combattre les troupes françaises d'une manière plus classique.
La France, quant à elle reçut l'aide financière des U.S.A., engagés dans la guerre de Corée et désireux de stopper la poussée communiste dans le Sud-Est asiatique.
Par contre, l'Union Française en Indochine se disloque face aux désirs nationalistes des gouvernements du Viêt-nam, du Laos et du Cambodge qui exigent la rupture des liens avec la France. La France combat ainsi pour des Etats qui veulent son retrait total à la fin du conflit.
La situation militaire se détériore face à un adversaire de plus en plus déterminé, mieux armé et totalement acquis à la cause communiste tandis que les moyens du corps expéditionnaire restent limités.
Les autorités françaises doivent ainsi se résoudre à évacuer les régions montagneuses et se replier sur le delta au Tonkin.


Le massacre de la route coloniale 4


La Légion à
Cao Bang

Le désastre de la RC4

Vô Nguyen Giap, voulait tenir la route coloniale 4 afin de pouvoir bénéficier du ravitaillement en armes et munitions en provenance de Chine.
La première étape consistait à prendre la place de Dong Khé qui tomba entre les mains du Viêt-minh le 18 septembre 1950. Les autorités décidèrent alors d'évacuer la place de Cao Bang se trouvant à quelques 150 kilomètres au nord de Dong Khé. Cao Bang, possédant une garnison d'environ 3 000 hommes, totalement isolée, ne pouvait pas résister à un assaut massif du Viêt-minh.
Le colonel Charton reçut l'ordre de se replier sur la ville de That Khé à environ 100 kilomètres au sud de Cao Bang.
Une colonne de secours conduite par le colonel Lepage venant de That Khé devait venir à la rencontre des hommes de Cao Bang. Ce repli sur That Khé fut un véritable supplice.
Le Viêt-minh tendait des embuscades et décimait les rangs des soldats français.
Seuls quelques Légionnaires conduits par la capitaine Jeanpierre parvinrent à rallier That Khé.
En quelques jours, les Français y perdirent 4 800 tués ou disparus et 2 000 blessés sans compter un important matériel. La captivité des soldats faits prisonniers dura 4 longues années. Une minorité survivra.
La majorité de ces hommes mourut dans ces camps des suites de privations ou sous la torture infligée par des geôliers cruels.
Parmis ces geôliers, on y trouva même un Français, Georges Boudarel (qui était professeur de philosophie) qui devint l'un des responsables du camp de prisonniers No 113.
Il revint en France dans les années 1960 alors que sa condamnation à mort pour haute trahison avait été abolie...


Le général de Lattre de Tassigny

de Lattre de Tassigny

A la suite des désastres de Cao Bang, de Dong Khê et de Langson, au nord du pays, le gouvernement chercha à rétablir la confiance en nommant, le 6 décembre 1950, le général de Lattre de Tassigny, commandant en chef des troupes d'Indochine et, sur sa demande, il fut également nommé Haut-Commissaire.
Il chercha à redresser une situation militaire extrêmement difficile : le Viêt-minh contrôlait désormais une part importante du nord du pays.
Les Français redressèrent la situation en remportant les batailles défensives de Vinh-Yen en janvier 1951, au cours de laquelle furent utilisés des bombardements au napalm, et de Dong-Trieu en mars 1951.
Il chercha enfin à isoler le delta du fleuve Rouge, qui était la région la plus prospère, du reste du pays.
Mais, gravement malade, et éprouvé par la mort de son fils en Indochine, il fut rapatrié en France où il mourut le 11 janvier 1952.


L'opération "Atlante"

Diên Biên Phu

Avant de quitter le Viêt-nam, de Lattre avait décidé de passer à l'offensive sur les territoires contrôlés par le Viêt-minh.
Les Français prirent ainsi le site de Hoa Binh, qu'ils occupèrent facilement mais qu'ils finirent par abandonner au terme d'une longue bataille entre novembre 1951 et février 1952.
Les Français ne purent pas empêcher le Viêt-minh de reprendre pied dans le delta, ni d'en faire l'une de ses bases.
En mai 1953, le général Navarre remplaça le général Salan.
Les conditions militaires s'étaient encore nettement aggravées pour l'armée française.
Le Viêt-minh dominait une grande partie du nord du pays, hormis Hanoi et de Haiphong.
Il avait également pris pied dans le delta du fleuve Rouge.
Le général Navarre voulait contenir le Viêt-minh jusqu'à ce que les armées locales formées par la France soient en mesure de prendre la relève des Français. En apprenant que le Viêt-minh voulait s'emparer de Luang Prabang, Navarre voulut gêner les communications de l'ennemi en créant un point de fixation proche du Laos. Il décida de ce fait d'occuper Diên Biên Phu - une cuvette dénudée - situé près du Laos.
L'opération fut baptisée "Atlante".
Le gouvernement français, espérait remporter une victoire face au Viêt-minh, il voulait ainsi aborder les négociations de paix en position de force.
Cette bataille allait décider du sort de cette guerre.


Diên Biên Phu

Diên Biên Phu

Le 20 novembre 1953, les parachutistes français arrivèrent à Diên Biên Phu.
Cette ancienne base aérienne utilisée par les Japonais compta rapidement 15 000 hommes.
Son ravitaillement était hélas aléatoire, car les terrains d'aviation se trouvaient sous de feu de la DCA du Viêt-minh. Diên Biên Phu ne pouvait être ravitaillé que par parachutage.
Le commandement français avait commis une grave erreur.
En effet il avait jugé impossible une concentration importante d'armes lourdes de la part du Viêt-minh.
Il réussit au contraire un tour de force logistique en acheminant par la jungle (à pied ou à bicyclette) des armes lourdes, des canons antiaériens et des milliers d'armes.
Le Viêt-minh disposa ainsi d'environ 55 000 combattants.
Les Français établirent des postes avancés qui reçurent des prénoms féminins, et qui tombèrent les uns après les autres L'assaut final des Viêt-minh eut lieu le 6 mai 1954. Cet assaut coûta la vie à 4 500 soldats français et à 8 500 combattants du Viêt-minh.
Le lendemain, le commandant en chef - le général de Castries - se rendait.


La fin


Mendès France

La conférence de paix de Genève s'ouvrit le 8 mai 1954.
Le gouvernement français avait signé le 28 avril, un traité avec le Sud-Viêt-nam, lui accordant l'indépendance.
Le nouveau gouvernement dirigé par Pierre Mendès France signa les accords de Genève le 20 juillet 1954.
Ils organisaient la partition du Viêt-nam (malgré les protestations du président du sud Viêt-nam, Diem) en deux Etats séparés par le 17ème parallèle.
En outre, des élections devaient être organisées dans les deux Viêt-nam, au Laos et au Cambodge avant juillet 1956.
Le bilan de la guerre d'Indochine se chiffre à 20 000 morts français, 11 000 légionnaires, 15 000 Africains et 46 000 Indochinois.
Il faut ajouter à ces chiffres le nombre très important de prisonniers de l'armée française qui moururent durant leur captivité et qui reste inconnu.
Le Viêt-minh eut très probablement des pertes supérieures.
Au total, 500 000 personnes civiles ou militaires perdirent la vie durant ce conflit.

 



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