1917, le Zeppelin démystifié
Par Fabrice Thery


Robert Leckie
(1890-1975


Les certitudes de Peter Strasser.

Peter Strasser a passé les deux premières années de guerre en tant que commandant de la Marine-Luftschiff-Abteilung. Il possède une excellente expérience et une maîtrise totale de l’utilisation du Zeppelin en tant que bombardier stratégique. Ses sorties audacieuses au-dessus de la Grande-Bretagne ont fait de lui un héros de l’Allemagne en guerre. Sa loyauté envers le Kaiser et sa popularité le désignent tout naturellement, fin 1916, pour devenir le chef légitime des branches aérostières de la Marine et de l’Armée. Les pertes en dirigeables et en équipages qualifiés ont été énormes en 1916 et le moral des aérostiers est au plus bas. Strasser n’ignore pas le danger que représente maintenant l’aviation alliée. Il sait que celle-ci s’est modernisée. Même si elle manque encore de pilotes expérimentés, capables de rivaliser dans les airs avec les Fokkers et les Albatross, elle dispose maintenant d’appareils performants, tout à fait capables d’anéantir un dirigeable.
La chasse de nuit s’est en effet grandement développée. Le chasseur britannique Sopwith Pup, mis en service dans la seconde moitié de 1916, atteint la vitesse de 171km/h et une altitude de 5600m, grâce à une grande surface alaire qui lui confère une bonne vitesse ascensionnelle. Son successeur déjà à l’étude, le Camel, sera capable de grimper à 5800m et d’atteindre 185km/h. Côté français, les appareils évoluent à une moindre altitude (5300m pour le Nieuport 17 et le Spad VII) mais le Spad est pour l’instant le chasseur le plus rapide (192 Km/h).
En 1917, le chasseur Henriot HD.1, boudé par les français fait merveille chez les belges et les italiens. Cet excellent chasseur sesquiplan est le seul dont le plafond opérationnel atteigne 6400m ! La navigation nocturne devient plus aisée notamment après l’adoption du dispositif d’éclairage embarqué, breveté par le français Léon Cibié en collaboration avec Farman et Blériot. Dans le domaine de l’armement, le système de fusée incendiaire « Le Prieur » est au point depuis mai 1916. Il équipe notamment l’escadrille N62, à Cachy (Somme). Le dispositif est fixé par 4 ou 5 fusées à l'extérieur des mats de voilure des biplans. Les supports et les ailes sont protégés des flammes par un revêtement en amiante et aluminium.
La mise à feu électrique s'effectue à une centaine de mètres de la cible en attaquant en piqué et transversalement.


Système de fusées Le Prieur, monté sur Nieuport 16.

Face à la menace grandissante de ces nouveaux « intercepteurs », Strasser souhaite que sa flotte soit équipée au plus vite d’un nouveau type de Zeppelin, capable d’évoluer à plus de 6000 m, hors de portée des appareils alliés alors en service. Il faut également que celui-ci soit rendu plus discret par camouflage.

La création des Zeppelins « High Climbers ».

Parallèlement au développement du Zeppelin type R (198m de long), début 1917, la Zeppelin Luftshiffbau GmbH répond aux besoins de Strasser en créant un nouveau dirigeable beaucoup plus léger que ses prédécesseurs.
Il peut naviguer à des altitudes jamais atteintes.
Le dessous de ces zeppelins sera peint en noir pour réduire leur signature aux observateurs terrestres. Le premier dirigeable classe S « High Climber » ou « Grimpeur » est opérationnel en février 1917. Il s’agit du LZ-91. Il est bien entendu immédiatement affecté à la Marine sous le code (L-42).
Sa structure a été allégée pour lui permettre de gagner en altitude et surtout en vitesse ascensionnelle. Mais cette structure est cependant fragilisée, alors qu’elle doit supporter des pressions de plus en plus élevées.
Durant l’année 1917, d’anciens Zeppelins de classe M sont convertis également en classe S, avec 5 nouveaux moteurs plus puissants, remplaçant les 6 précédents. Les Grimpeurs atteignent une vitesse de croisière de 113Km/h.
Ils peuvent atteindre des altitudes de 6100m sans difficulté, opérant ainsi hors d’atteinte des avions.
Les pilotes de chasse qui s’aventurent à de telles hauteurs, subissent un froid polaire et ressentent des vertiges à cause du manque d’oxygène.
Ils exposent leurs appareils à de graves avaries : les durites de carburant éclatent, l’huile fige dans les circuits et l’eau dans les radiateurs gèle. Parfois même, les pare-brises des habitacles éclatent.
Mais les conditions atmosphériques sont toutes aussi éprouvantes pour les équipages de dirigeable et la faible précision qui caractérisait déjà les bombardements des Zeppelins, devient franchement aléatoire avec une visibilité réduite de l’objectif à très haute altitude.

La fin du Comte Zeppelin et les premières missions des « grimpeurs ».

Ferdinand von Zeppelin s’est retiré des affaires mais il a parfaitement saisi les limites et faiblesses de son dirigeable en tant que matériel militaire. Depuis plusieurs mois, il a orienté avec succès ses collaborateurs vers la construction d’appareils d’avenir comme les bombardiers ou les hydravions géants. Dornier touche d’ailleurs presque au but dans sa mise au point de son hydravion monoplan Zeppelin Lindau Rs III, à l’envergure impressionnante de 37m ! Mais le comte, âgé de 79 ans, ne verra pas l’aboutissement du projet. Il décède au cours d’un voyage, le 8 mars 1917 à Charlottenburg, près de Berlin. Ses obsèques, dans le cimetière Pragfriedhof de Stuttgart sont une cérémonie grandiose.
L’histoire du fameux dirigeable rigide continue désormais avec Hugo Eckener qui prend la tête de la Zeppelin Luftshiffbau GmbH. Pour le monde entier, l’illustre nom de Zeppelin restera synonyme de la fascination et de l’attrait des hommes pour les dirigeables.
Le premier raid des nouveaux Zeppelins n’intervient que dans la nuit du 16 au 17 mars. Les cinq premiers « grimpeurs » rencontrent des vents très violents et aucun ne parvient jusqu’à sa cible. Les difficultés pour mener à bien les missions de bombardement augmentent.

En 1917, la chasse britannique devient chaque jour plus agressive et efficace. Le 14 mai notamment, un Squadron du RNAS (Royal Naval Air Service) se lance aux trousses du L-22 (LZ-64). A bord d’un hydravion à coque Curtiss H.12, un pilote canadien, le Flight Commander Robert Leckie, parvient à détruire le dirigeable qui plonge en flammes vers la mer, au large de Terschelling, (Nord des Pays Bas).

Certain raids isolés deviennent épiques. Ainsi, le 4 mai, le L-43 surprend et tente de bombarder le HMAS Sydney.
Le combat est interminable et ne cesse qu’après que le dirigeable et le navire aient épuisé la totalité de leurs munitions, sans avoir pu sérieusement s’endommager. Un nouveau raid est tenté sans succès, dans la nuit du 23 au 24 mai. Le kaiser, lassé du manque de succès de ce projet ruineux, déclare bientôt que les bombardements de Zeppelins sur Londres appartiennent au passé. Il autorise les raids de jours de bombardiers Gothas dès le 26 mai, et décide de reléguer le Zeppelin à des tâches de bombardement subalternes. Sous les demandes pressantes de Strasser, il revient pourtant partiellement sur sa décision, autorisant les Zeppelins de la Marine LuftschiffAbteilung à mener des bombardements, lors de conditions météorologiques favorables uniquement. Dès le 14 juin, un nouveau Zeppelin, le LZ-92 (L-43) est abattu par la chasse britannique lors d’une mission de reconnaissance.
Un autre raid est autorisé dans la nuit du 16 au 17 juin contre Ramsgate. Une nouvelle fois, un vent violent se lève au cours de la mission et seulement deux dirigeables sur six engagés parviennent au-dessus de la Grande-Bretagne.
Le L-42 (LZ-91) touche un hangar à munitions à Ramsgate mais le L-48 (LZ-95), mis en service à peine un mois auparavant, montre rapidement des problème de moteurs. De plus, son compas semble faussé et il a du mal à s’orienter. Il tente alors de descendre et de bombarder à 4000m, altitude devenue maintenant dangereuse pour les Zeppelins. Il est vite repéré au-dessus de la mer par quatre chasseurs du R.F.C qui parviennent à le toucher dans le secteur de Great Yarmouth. Il s’écrase à Leiston dans le comté du Suffolk. Il n’y a que 3 survivants.
Les membres d’équipage du L-48 sont ensevelis par les anglais à Theberton.


Le "Grimpeur" L-48 avait à peine un mois de service lorsqu'il fut abattu, le 17 juin 1917.

L’Armée abandonne le Zeppelin.

L’Armée abandonne le Zeppelin. Suite aux nombreux échecs subis depuis le début de l'année 1917, l'Armée de terre décide d'abandonner progressivement l'utilisation du Zeppelin. Elle laisse ainsi le champs libre à la Marine qui attend ce moment depuis longtemps.. Depuis sa prise de commandement, Strasser qui doute des capacités des aérostiers de l’Armée et n’a guère confiance en eux, favorise évidemment la Marine dans l’acquisition de nouvelles machines. En 1917, Strasser a éliminé toute concurrence et sur 21 zeppelins construits, deux seulement (LZ-113 et LZ-120) sont attribués à l’Armée. Celle-ci a, de plus, cédé le LZ-57 (LZ-87) et le LZ-68 (LZ-98) à la Marine, fin 1916.
En 1917, l’Armée confie deux autres Zeppelins à la Marine. Celle-ci les affecte à des missions et techniques expérimentales. Ainsi le LZ-58 (LZ-88), devient le L-25 en janvier 1917. Le LZ-81 (LZ-111) quant à lui, est cédé en mai 1917. Huit zeppelins produits en 1916 et appartenant à l’Armée seront également réformés avant la fin de l’année. Réforme de l’année 1917 :

Réforme de l’année 1917 :

LZ-42 (LZ-72) : Utilisé comme dirigeable école, est réformé après le constat de fissures dans son armature métallique, en février 1917.

LZ-63 (LZ-93) : Participe à trois attaque contre Dunkerque, Mardick et Harwich sur lesquels il largue 3240 Kg de bombes. Réformé en 1917.

LZ-67 (LZ-97) : Participe à 4 bombardements (2 sur Londres, 1 sur Boulogne, 1 sur Bucarest). Largue un total de 5760 Kg de bombes. Réformé le 5 juillet 1917.

LZ-77 (LZ-107) : Ce type « Q » ne participe qu’à un bombardement (1440 Kg de bombes sur Boulogne). Réformé en juillet 1917.

LZ-73 (LZ-103) : Ne participe qu’à une seule mission de bombardement (1530 Kg de bombes sur Calais). Zeppelin de type « Q », réformé en août 1917.

LZ-81 (LZ-111) : Cédé par l’Armée à la Marine en mai 1917. Il est réformé le 10 août 1917, après 7 missions de reconnaissance au-dessus de la mer Baltique.

LZ-26 (Z-XII) : Dernier Zeppelin en service produit en 1914. (Type « N », il a participé à plus de 11 attaques sur le Nord de la France, la Pologne et la Russie, larguant un total de plus de 20 tonnes de bombes (notamment 9 tonnes sur la ligne de chemin de fer reliant Varsovie à Petrograd et sur les gares de Malkin et Bialystok. Il est réformé le 8 août 1917.

LZ-71 (LZ-101) : Basé à Yambol (Bulgarie). Participe à 7 missions de bombardement (largue en tout 12 tonnes de bombes sur Bucarest, Ciulnita, Fetesti, Galati, Odessa, Mytilene, Iasi et Moudros). Démantelé en septembre 1917.

Plusieurs Schütte Lanz sont aussi déclassés :

SL-13 : Basé à leipzig et mis en service le 29 octobre 1916, il était utilisé pour l’entraînement. Gravement endommagé par l’effondrement de la toiture de son hangar, sous le poids de la neige, il est réformé le 8 février 1917.

SL-7 : Basé à Königsberg, ce Schütte Lanz a effectué 3 raids de bombardement et 3 missions de reconnaissance. Réformé après réparation de sa structure, le 6 mars 1917. SL-15 : Basé à Mannheim. Réformé sans avoir connu le service actif, en août 1917.

NB : Les Schütte Lanz SL-17 et SL-18 basés à Allenstein et Leipzig, ne seront jamais mis officiellement en service. Le SL-17 est reformé en août 1917. le SL-18, endommagé par l’effondrement de son hangar est détruit le 8 février 1917.

La Marine qui a commencé à recevoir ses nouveaux « grimpeurs », réforme les 6 dirigeables suivants :

LZ-45 (L-13) : Participe à 15 attaques sur la Grande–Bretagne (21 tonnes de bombes larguées) et à 45 missions de reconnaissance. Zeppelin de type « P », réformé le 25 avril 1917.

LZ-57 (LZ-87) : Cédé par l’Armée à la Marine en juillet 1916. 2 attaques sur Ramsgate et Margate (3 tonnes de bombes). 16 missions de reconnaissance au-dessus de la mer Baltique pour le compte de la Marine, puis utilisé comme dirigeable école. Zeppelin de type « P », réformé en juillet 1917.

LZ-68 (LZ-98) : Participe à une attaque sur Londres (1513 Kg de bombes). Cédé à la marine en novembre 1916. Il est réformé en août 1917, après avoir mené 15 missions de reconnaissance au-dessus de la mer Baltique.

LZ-75 (L-37) : Prend part à 4 raids sur l’Angleterre (largue 6,5 tonnes de bombes). 17 missions de reconnaissance en mer du Nord et en Mer Baltique. Dirigeable de type « R » (super Zeppelin), réformé le 24 décembre 1917. Il sera revendu après-guerre au Japon, en 1920.

SL-8 : Basé à Seddin, mène 34 missions de reconnaissance et trois raids de bombardement. Il pouvait emmener jusqu’à 4 tonnes de bombes à chaque mission. Le SL-8 possède le record de missions effectuées par un Schütte Lanz. Il est réformé le 20 novembre 1917.

SL-14 : Basé d’abord à Seerapen puis à Wainoden, il fut mis en service le 16 mai 1916. Il n’a mené que 2 missions de reconnaissance et deux autres de bombardement. D’abord réaménagé en février 1917, il est finalement réformé le 18 mai 1917.

Le Royal Flying Corps rapatrie des escadrilles pour organiser la Home Defence.

Face à la menace aérienne allemande grandissante, le commandement du Royal Flying Corps songe à la création d’une force aérienne chargée de la défense du territoire (Home Defence). Dans l’urgence, en juin 1917, il ordonne temporairement le rapatriement d’escadrilles de chasse équipées de matériels modernes et dotées de pilotes expérimentés. Il s’agit de faire face à la fois à la menace Zeppelin mais également à celle grandissante des raids de jour de bombardiers Gothas (le dernier a eu lieu le 13 juin et a été mené par 14 appareils). Ainsi, 95 chasseurs modernes Sopwith Pup et Royal Aircraft Factory Se5a des escadrilles rapatriées, sont affectés en priorité à la protection de Londres. Le 21 juin, le Squadron 66 quitte Calais pour rejoindre le pays. Il rejoint le célèbre Squadron 56 qui se voit bientôt enrichi d’as célèbres tels James Mc Cudden.L’effort est important et prive le RFC de deux de ses meilleures unités de chasse, alors que la bataille de Messines (Flandres) bat son plein. Le Squadron 66 est d’ailleurs renvoyé sur Calais une dizaine de jour plus tard. Il est par la suite appelé (mais trop tardivement) à la rescousse le 4 juillet, pour attaquer des Gothas sur leur trajet retour, après une attaque sur Harwich. Ce vol sera intercepté malgré tout au Nord-Ouest d’Ostende par cinq Sopwith Pup du RNAS, en provenance de Dunkerque. Sans parvenir à les abattre, le Flignt Commander A. M. Shook et le Flight Sub-Lieutenant S. E. Ellis signaleront toutefois avoir touché chacun un bombardier qui perdait de l’altitude, suivi d’un fumée noire.
Les Squadron 66 et 56 étant réclamés d’urgence dans les Flandres, c’est finalement le Squadron 46, volant également sur Pup, qui intègre la Home Defence. Il s’installe le 10 juillet à Sutton’s Farm, dans le comté de l’Essex. Il rejoindra de nouveau le front le 30 août, une fois la création de la Home Defence effective. Trois nouvelles escadrilles sont créées à cet effet. Deux sont équipées du Sopwith Pup qui montre de belles qualités en haute altitude. Il s’agit du Squadron 112, formé à Throwley, le 30 juillet et du Squadron 61, formé à Rochford, le 02 août 1917. Le dernier Home defence Squadron est le 44, stationné à Hainault Farm. Pour accroître le potentiel du Sopwith Pup en altitude, des tests sont menés avec un nouveau moteur Gnôme mono soupape de 100 cv. Le moteur est aussitôt adapté sur les appareils de la Home Defence qui gagnent ainsi 1000 pieds en plafond et une vitesse ascensionnelle plus importante. Le Squadron 61 reçoit son baptême du feu dès le 12 août en tentant d’intercepter 10 Gothas qui viennent de Bombarder Rochford, Leigh, Westcliffe et Southend.
Les bombardiers parviennent à s’échapper mais l’un d’eux est abattu par le Flight Lieutenant H. S. Kerby, du RNAS, qui a décollé entretemps du terrain de Walmer.

La Royal Navy s’équipe du Sopwith Pup.

La Navy s’intéresse de près au petit chasseur Pup. Elle souhaite remplacer ses appareils obsolètes qui ont montré leurs défaillances lors des opérations menées par ses porte-hydravions, entre 1914 et 1916. En juin 1917, le Flight Commander F. J. Rutland réussit le premier décollage d’un Pup à partir d’un navire. Il est aussitôt décidé d’équiper les croiseurs légers de ponts d’envol, afin de généraliser l’emport de chasseurs. On assiste alors à la naissance de l’aviation embarquée britannique.
Au début, dans l’urgence, certains Pup embarqués sont lancés par catapulte, mais les chances de récupérer l’appareil en fin de mission sont minces.
Le 21 août, le croiseur HMS Yarmouth équipé du Pup et d’une plateforme d’envol, accompagne un mouilleur de mines au large des côtes danoises. Les vigies du Yarmouth repèrent un Zeppelin, le L-23 (LZ-66) vers 05H30 du matin. Aussitôt le Pup du Yarmouth est lancé à ses trousses. Le pilote, le Flight. Sub-Lieutenant B.A. Smart, rattrape le L-23 une heure plus tard. Il grimpe à 460 mètres au dessus du dirigeable et pique sur lui, ouvrant le feu de tout son armement. Il parvient à redresser et évite la collision alors qu’il n’est plus qu’à 20 mètres de sa cible. Le L-23, touché à mort, brûle comme une torche et ses restes s’écrasent en mer. Smart est obligé de se poser sur l’eau, près du vieux croiseur de bataille Prince of Wales. L’équipage parvient à récupérer le pilote juste avant que son avion ne coule.


Embarquement d'un chasseur Sopwith Pup sur le HMS Malaya (1917). Notez les grues fixées sur les canons de 380mm.

Utiliser le « grimpeur » en aéronef de liaison et de ravitaillement.

Le haut commandement allemand tente de redéfinir les missions du Zeppelin. Il ne croit plus à son potentiel de terreur et de destruction. Il souhaite cantonner les dirigeables a des missions de reconnaissances et d’appui malgré la volonté de Strasser de continuer les raids .
En Afrique de l’Est, les troupes allemandes du Général Paul Emil von Lettow-Vorbeck perdent du terrain et se trouvent bientôt isolées du reste du monde.
Le commandement allemand conçoit alors l’idée folle d'envoyer un dirigeable, dans le but d'apporter des vivres et du matériel aux militaires.
Il compte ainsi remonter le moral des troupes et le prestige de la nation.
Le L-59 est affecté à cette mission et une fois aménagé, effectue un périple de 5 800 km jusqu'en Afrique.
Le Zeppelin quitte sa base de Yambol, en Bulgarie dans la soirée du 21 novembre, avec un équipage presque inexpérimenté. Il effectue un vol de 40 heures mais alors qu’il franchit la frontière entre l’Egypte et le Soudan, il reçoit l’ordre par radio d’interrompre sa mission. Le haut commandement qui n’a plus de nouvelles depuis des jours de son corps expéditionnaire, craint qu’il ne soit pas au rendez-vous! Le L-59 tente alors de faire demi-tour pour rejoindre sa base. Il bat ainsi le record du plus long vol de guerre de l'histoire, soit 95 heures ! Un autre grimpeur, le L-57 (LZ-102), était prévu pour assurer cette mission. Mis en service le 26 septembre 1917, il fut malheureusement très gravement endommagé lors d’une violente tempête, 12 jours après, le 8 octobre.

Les derniers records, lors du grand raid de Zeppelins, 19 au 20 octobre 1917 :

Peter Strasser croit toujours dur comme fer à l’utilisation du zeppelin comme arme stratégique. Il arrache au commandement allemand, l’autorisation de mener un raid massif contre l’Angleterre. Le 19 octobre 1917, une impressionnante armada, composée de onze dirigeables allemands dont 8 grimpeurs (L-41, L-44, L-45, L-46, L-47, L-49, L-50, L-52, L-53, L-54 et L-55) part pour effectuer un raid massif sur l'Angleterre. Deux autres n’ont apparemment pas été en mesure de décoller. Alors que le départ a lieu par beau temps, le retour devient rapidement un vrai cauchemar. Plusieurs dirigeables, gênés par les conditions météo, dérivent ou sont déportés par les bourrasques qui les obligent à survoler le territoire français. Le L-45, parvient à échapper à un chasseur britannique BE2e et traverse la France. Il survole Lyon mais avec deux moteurs hors d'usage et un autre endommagé, il se retrouve incapable d'atteindre la Suisse. Il se pose à Mison près de Sisteron, au confluent de la Buèche et de la Durance. L'équipage met le feu au dirigeable avant d'être capturé. Le Zeppelin L-49 est assaillit par la chasse française. Il se pose tant bien que mal à proximité de Serqueux et de Bourbonne-les-Bains (Lorraine) et tombe presque intact dans les mains des Français. La prise est de taille et des ingénieurs français et américains ne tardent pas à arriver de toute part pour étudier et analyser le moindre millimètre carré du dirigeable. Ils ignorent alors que le L-49 est un « Grimpeur ». Les spécialistes alliés, trompés par son design comparable à celui du L-30, pensent que leur prise de guerre est un dirigeable de moyenne classe. C'est-à-dire pouvant atteindre une vitesse de croisière de pratiquement 100 km/h et une altitude de 4000m.


Le L-49 récupéré pratiquement intact après son atterrissage forcé à Bourbonne-les-Bains.

Après avoir bombardé Birmingham à une altitude de 20000 pieds, le L-55, plus chanceux que ses congénères, dérive derrière le front Ouest. Il est très sérieusement handicapé par un moteur défaillant, en surchauffe. Son commandant décide de réduire le régime tout en maintenant son altitude à plus de 6000m, pour parvenir à échapper à la chasse.
Il ne survole le territoire français qu’après l’aube.
De ce fait, le soleil montant augmente la température du gaz de l’enveloppe et le L-55 atteint bientôt 7600m, pulvérisant ainsi le record d’altitude de la Grande guerre ! L’équipage et le Capitaine sont même forcés de se placer vers l’avant du dirigeable afin de l’alourdir et d’éviter qu’il ne grimpe plus. Une fois l’altitude réduite, l'équipage « secoué » commence à reprendre conscience et les moteurs congelés se réchauffent.
Le L-55 est à court de carburant quand il s’écrase lentement dans le centre de l’Allemagne. Mais à peine a-t-il touché sol et son équipage débarqué, qu’il s’enflamme, provoquant sa destruction en quelques instants! Lors de cette unique prouesse, l’équipage du L-55 enregistre deux records : celui de l’altitude et celui du nombre d’heures passées par un équipage survivant à plus de 6000m. Le L-44, commandé par le KapitänLeutnant Stalbert, est abattu au dessus de Chennevières par la section de D.C.A. N°174 du Lieutenant Fenouillet et du Sous-Lieutenant Curie. Il s'écrase aux environs de Saint Clément (près de Luneville). Les 19 officiers et membres de l'équipage sont tués dont L'Oberleutnant Rothe et 4 hommes qui s’écrasent au sol, après avoir sauté dans le vide. Le L-50, à court de carburant est poussé inexorablement vers la France, par les courants aériens. Il tente d’atterrir près de Dammartin sur Meuse (Lorraine) pour se soulager d’une partie de son poids en abandonnant deux cabines et la majorité de son équipage.
Reprenant son vol avec à son bord 2 à 4 hommes, il dérive, désemparé, jusqu’au dessus de la mer Méditerranée.
Il ne rentrera jamais et sera aperçu une dernière fois dans la région de Fréjus. Sur les 11 dirigeables ayant participé à l’attaque, seuls les L-41, L-46, L-47, L-52, L-53 et le L-54 rentrent indemnes mais après bien des détours et des péripéties. Le L-53 après avoir survolé Bar Le Duc et Nancy, sera notamment l’unique Zeppelin à parvenir à passer la frontière sans difficulté, près du secteur meurtrier de Lunéville, vers 3 H du matin. Les pertes lors de cette mission sont tragiques alors que les résultats du bombardement sont assez faibles (les britanniques déplorent tout de même 34 morts et 45 blessés). Seul le L-45 a véritablement accompli sa mission avec succès. Ses premières bombes lâchées sur l’aérodrome de Hendon, il arrose bientôt le cœur de Londres. D’abord Piccadilly, puis une bombe de 150 Kilos tombe sur Glenview Road à Hither Green (aujourd’hui Nightingale Grove). Cette bombe, considérée comme la dernière larguée par un Zeppelin sur la capitale britannique pendant la première guerre, détruit trois maisons, en endommage plusieurs autres et surtout tue une vieille femme, deux adultes, trois jeunes gens et dix enfants dont sept appartenant à la même famille. Une autre engin, tombé à Camberwell (banlieue sud de Londres) fera dix tués dont deux marins de l’équipage du patrouilleur P14. Il est à noter qu’au cours du grand raid, aucun Zeppelin ne fut touché au dessus de l’Angleterre. Le 20 octobre marque la fin des grands raids de Zeppelins contre l’Angleterre. Avec 6 dirigeables perdus pour un résultat somme toute minime, le commandement allemand juge qu’il est grand temps que les bombardiers Gothas, plus économiques, discrets et efficaces, prennent le relai des bombardements stratégiques. Pour les aérostiers et aviateurs allemands, il devient chaque jour plus difficile de bombarder l’Angleterre et surtout d’en revenir indemnes. Leurs pertes en équipages augmentent nettement durant l’été 1917. Plus aucun Zeppelin ne se risquera au-dessus des îles britanniques jusqu’à la fin de l’année. Le bilan de 1917 est catastrophique avec 14 dirigeables abattus.
A l’aube de l’année décisive de la Grande Guerre, le mythe du Zeppelin a vécu mais Peter Strasser n’a pas dit son dernier mot…

Les pertes de dirigeables pour 1917 :

LZ-82 (L-36): Après à peine deux mois de service, totalise 20 vols dont quatre de reconnaissance au- dessus de l’Angleterre et la mer du nord. Endommagé lors d’un atterrissage par temps de brouillard, le 7 février 1917 à Rehben-an-der-Aller. Irréparable, il sera déclassé. 

LZ-86 (L-39): Mis en service le 11 Décembre 1916. Effectue deux missions de reconnaissance au-dessus de la mer du Nord. Une attaque contre l’Angleterre où il largue 300 kilos de bombes. Détruit lors du trajet retour par la D.C.A française près de Compiègne, le 17 mars 1917. 

SL-9 : Mis en service le 30 mars 1917. Basé à Seddin, participe à 13 missions de reconnaissance et 4 missions de bombardement, emmenant chaque fois avec lui jusqu’à 4230 Kg de bombes. Touché par un éclair le 30 mars 1917, il s’écrase dan la mer Baltique.

LZ- 64 (L-22): Mis en service le 3 Mars 1916. Totalise 30 missions de reconnaissance et 8 bombardements sur la Grande-Bretagne, larguant un total de 9215 kg de bombes. Abattu par le Flight Commander Robert Leckie près de Terschelling, le 14 Mai 1917 (Leckie sera plus tard également crédité d’une victoire en abattant le LZ-112 (L-70).

LZ-92 (L-43): Mis en service le 6 Mars 1917. Totalise 6 missions de reconnaissance, une attaque contre des docks en Angleterre où il largue 1850 Kg de bombes. Abattu par un chasseur britannique le 14 juin 1917, lors d’une mission de reconnaissance.

LZ-88 (L-40): Mis en service le 3 Janvier 1917. Effectue 6 missions de reconnaissance et 2 attaques sur la Grande-Bretagne, totalisant 3105 kg de bombes larguées (pour des résultats plus que minimes). Endommagé après un atterrissage raté sur la base de Nordholz, le 16 juin 1917, il ne sera pas réparable. 

LZ-95 (L-48) : Mis en service le 22 mai 1917. Effectue une seule mission de reconnaissance. Abattu par la chasse britannique, s’écrase à Leiston, le 17 juin 1917. 

LZ-66 (L-23) : Mis en service le 8 Avril 1916. Effectue 51 missions de reconnaissance et 3 raids contre l’Angleterre, larguant un total de 5254 kg de bombes. Abattu en mer le 21 aôut 1917, par le Flight Sub lieutenant Bernard A Smart, aux commandes d’un Sopwith Pup décollé du croiseur HMS Yarmouth.

LZ-102 (L-57): Mis en service le 26 Septembre 1917, ne prendra pas part au combat. Prévu pour la mission de secours en Afrique, il sera mis définitivement hors service, lors d’une tempête, le 8 octobre 1917. 

LZ-101 (L-55): Mis en service le 1er Septembre 1917. Effectue deux bombardements pour un total de 5450 Kg de bombes larguées. Très sérieusement touché lors de sa dernière attaque le 19 Octobre 1917, il dérive derrière le front et prend un maximum d’altitude pour parvenir à s’échapper. Il atteint alors 7600m, record d’altitude absolu de la Grande Guerre. Jugé trop endommagé après l’incendie consécutif à son atterrissage, il sera démantelé. 

LZ-50 (L-16): Mis en service le 23 Septembre 1915. Totalise 44 missions de reconnaissance et 12 attaques contre l’Angleterre, larguant 18048 Kg de bombes. Durant l’hiver 1916, il est désigné pour délivrer du ravitaillement aux îles allemandes en mer du Nord. Endommagé le 19 Octobre 1917, lors d’un atterrissage force à Brunsbüttel (Schleswig-Holstein), il ne sera pas réparé. 

LZ-93 (L-44): Mis en service le 1er avril 1917. Totalise 8 missions de reconnaissance et 4 raids contre l’Angleterre et différentes unités de la Navy. Abattu au-dessus de St Clément par la DCA française, lors du grand raid du 19 au 20 octobre.

LZ-96 (L-49): Mis en service le 13 Juin 1917. Effectue deux missions de reconnaissance au-dessus de la mer du Nord et un raid contre l’Angleterre, larguant 2100 Kg de bombes. Lors du raid catastrophique du 19 au 20 Octobre 1917, il est attaqué vers 8H00 par des avions de l'escadrille N 152, basée à Corcieux dans les Vosges.
Il est forcé d’atterrir dans une zone boisée à 5km de où il est capturé presqu’intact par les forces françaises avec son commandant, le KapitänLeutnant Hans Gayer et la totalité de son équipage. L’étude de sa structure par les alliés permettra plus tard la création du premier dirigeable de type Zeppelin chez les américains, l’USS Shenandoah (ZR-1), mais également du modèle britannique R38.

LZ-89 (L-50): Mis en service le 9 Juin 1917. Dirigé par le KapitänLeutnant Roderich Schwonder, effectue 5 missions de reconnaissance au- dessus de la mer du Nord. Largue 4135 Kg de bombes en deux missions de bombardement contre l’Angleterre. A court de carburant, le 20 octobre 1917, il est poussé vers la France par les courants aériens. Il tente d’imiter le L-49 et d’atterrir près de Dammartin sur Meuse pour se soulager d’une partie de son poids en abandonnant deux cabines et la majorité de son équipage. Reprenant son vol avec à son bord 2 à 4 hommes, il dérive, désemparé, jusqu’au dessus de la mer Méditerranée. Il est aperçu une dernière fois dans la région de Fréjus avant de disparaître à jamais avec son équipage.

Sources :
http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Sch%C3%BCtte-Lanz_airships http://jmpicquart.pagesperso-orange.fr/dirigeableL49.htm http://lewishamwarmemorials.wikidot.com/incident:air-raid-ww1-19-20-october-1917 http://croquignard.over-blog.com/article-les-hautes-alpes-et-la-premiere-guerre-mondiale-48270807.html
http://www.flightglobal.com/pdfarchive/view/1954/1954%20-%200020.html http://1914-1918.invisionzone.com/forums/index.php?showtopic=154095 http://sped2work.tripod.com/zeppelins.html http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Zeppelins

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