La tête de pont de Dornot : l’Omaha Beach Lorrain
7-10 Septembre 1944
Par Marc Blindauer

General major
von Siegroths

 


1) Situation initiale


Fin Août, la 3ème Armée américaine sort d’un grave problème de pénurie de carburant et d’approvisionnement suite à la destruction par l’aviation des voies ferrées françaises. La quantité d’essence en ravitaillement passe de 400 000 gallons à 32000 gallons/jour.

Ses ordres sont de franchir le Rhin à hauteur de Francfort au plus vite, la prise de Metz n’étant considérée que comme une formalité. Patton s’exprime ainsi selon Cornelius Ryan (1) : « Il ya peut-être 5000, peut-être 10000 bâtards nazis dans leurs trous bétonnés devant la Third Army. Maintenant, si Ike arrête de soutenir Monty et me donne le ravitaillement, je traverserai la ligne Siegfried comme de la merde traverse une voie (ferrée ?) ». Ayant une âme de cavalier, Patton se contente de ses cartes au 1/100000ème et des reconnaissances aériennes du XIXth Tactical Air Command pour organiser la progression de son armée.

Le XIIth Army Corps (80th Infantry Division et 4th Armored Division) est envoyé dans la région de Nancy et occupe une bonne partie des forces allemandes. Il doit passer la Moselle à Toul, prendre Nancy et envelopper Metz par le sud et l’est. Le XXth A.C. de Walker doit se charger de la libération de Metz et Thionville puis foncer vers le nord du département jusqu’au Rhin.

Jusqu’au 05/09/1944, aucune estimation réaliste n’est faite sur les forces ennemies en présences et seuls les bilans très optimistes des quelques unités de reconnaissances envoyées dans le secteur sont disponibles. A cette date, le G-2 de la 3rd Army avance le chiffre de 38000 hommes et 160 blindés et canons d’assaut. Les carences en cartes précises vont jeter les troupes américaines dans la gueule du loup qui, heureusement pour elle, est fortement malade.

Dès le 06/09/1944, quatre puissantes colonnes parallèles se mettent en marche depuis la tête de pont sur la Meuse vers Metz et la Moselle avec la 90th I.D et le Combat Command A de la 7th A.D. au Nord et la 5th I.D. et le CCB de la 7th A.D. au Sud, le CCR reste en réserve derrière le 23th Armored Infantry Batallion. Les premiers contacts avec les Allemands ont lieu près de Mars la Tour (Axe Verdun-Metz) mais les premières oppositions sérieuses se font près de Gravelotte lorsque le CCB est accroché par le Fahnenjunker Regiment. Alors que la progression est rendue difficile par l’absence de réseau routier, une météo déplorable et une configuration géographique très défavorable aux blindés, le CCB oblique finalement vers le Sud-est en direction de Gorze au travers de bois et de ravines étroites pour tomber sur des mines et des canons antichars. Seul le 23th A.I.B va réussit à atteindre la rive occidentale de la Moselle mais la progression a mis en alerte les Allemands qui se sont retranchés en grande partie sur la rive orientale. Trois jours plus tôt, il n y avait là pratiquement aucune défense organisée.

Dans la nuit le 23th A.I.B, guidé par des volontaires mosellans, passe par le bois des Oignons et tourne par le sud le Groupe Fortifié Driant (Feste Kronprinz). A 4h00, ils atteignent Dornot mais sont finalement découverts lors de leur progression à flanc de coteaux vinicoles et sont obligés de battre en retraite devant la quasi absence de moyen et la riposte allemande.


2) La tête de pont de Dornot: L’Omaha Beach Lorrain

a) Le 7 Septembre

Le 7 Septembre n’ayant aucun moyen rapide de traverser, le CCB est dans l’incapacité de manœuvrer, et se trouve étiré en colonne depuis Gorze jusqu'à l’entrée de Dornot. La 5thI.D. est complètement dispersée dans cette zone puisqu’il n y a pas de front digne de ce nom. Seul le 11thI.R. est concerné, le 10thI.R. étant en réserve et le 2thI.R. plus au nord avec le CCA de la 7thA.D.

Bien que le Fort Driant et le GF Verdun (qui est un des objectifs) soient connus, leurs capacités de nuisances sont royalement ignorées. Aucun document sur les défenses de Metz n’est disponible.

Dès la levée du jour, les Allemands pilonnent les positions américaines avec des mortiers, des mitrailleuses, des canons automoteurs mais aussi avec les canons sous tourelles du Driant. Rappelons que les combats pour ce GF qui viennent de commencer ne s’arrêteront que le 11/12/1944.

Dornot et Ancy/Moselle sont en proie à une série de contre-attaques et seule l’arrivée de la CieA du 31ème bataillon de chars moyens va permettre de freiner les Allemands. L’ancrage sur la rive occidentale de la Moselle a permis de couper la ligne de défense Novéant-Gorze-Rezonville du colonel Von Siegroth commandant le Kampfgruppe du même nom qui comprend entre autres le régiment formé à partir des « Junkers » de Metz. Il est à noter qu’à cet instant, la 7thA.D. a déjà perdu dans la zone 25 blindés, beaucoup de morts et blessés et 150 prisonniers.

Vers midi le major-general Irwin, qui commande la 5th I.D., donne l’ordre au colonel Yuill (11thI.R.) de forcer le passage à Dornot. Un embouteillage monstre entre la division blindée et la division d’infanterie se produit alors dans les petites rues en pente de Dornot, rendant la progression très difficile. Aucune des deux unités ne s’attendait à trouver l’autre à cet endroit. Le 1er bataillon se trouve au sud de la localité et est quasi ignoré des Allemands mais, malgré les protestations de Yuill, c’est le 2ème Bataillon du Lt-colonel Lemmon sur les ordres d’Irwin qui est choisi pour traverser dès le lendemain matin avec l’aide du 23thA.I.B

D’après Lemmon et son S-3 à la conférence inter-officiers du soir, la situation est sans espoir car le feu ennemi balaye Dornot ainsi que le point de franchissement. Les Allemands occupent la rive occidentale au nord et des blindés détruits obstruent les routes. De plus, les champs environnants ont étés transformés en bourbiers par les pluies torrentielles qui tombent depuis plusieurs jours.

Afin de se représenter les lieux, Dornot est un petit village vinicole ne comptant qu’une seule rue à flanc de colline (surnommée plus tard par les GI’s la descente aux enfers) à environ 500m de la Moselle. Entre la fin du village et la rivière, il y a une route, une voie ferrée et un marécage à moitié occupé par un étang, le tout à découvert. De l’autre côté il y a le bois du fer à cheval, renommé ainsi par les Américains, puis une route orientée Nord-Sud. Ensuite le terrain grimpe jusqu’au sommet de deux collines où est implanté le GF Verdun (Feste Graf Von Haesseler).Ces deux positions offrent d’excellents postes d’observation sur le point de franchissement choisi par les Américains.

Pourquoi avoir choisi cet endroit ? Parce que pour un cavalier, l’absence de forêts denses de l’autre côté permet un déploiement rapide des blindés en soutien de l’infanterie qui tiendra ainsi une solide tête de pont. Ne connaissant toujours pas l’état des défenses, cela se tient. En face, il faut compter sur les fanatiques du Fahnenjunker Regiment au nord et, sur l’autre rive, sur le bataillon Voss (assez faible avec des hommes âgés et malades) et le bataillon Berg comprenant des membres SS de l’école de transmission de Metz. Mais ces derniers sont soutenus par une unité incontournable de la défense de la ville qui est ici pour réorganisation et montera en puissance au cours des jours suivant, la 17ème SS-Panzergrenadier division Götz Von Berlichingen.

b) Le 8 Septembre

Au matin du 8 Septembre, Dornot et le Hameau du Chêne un peu plus au nord sont toujours tenus par le 23th A.I.B, la Cie A du 31ème bataillon de chars moyens ainsi que la CieB du 33ème bataillon de Génie d’assaut blindé. Le fort Driant est pilonné par le 434ème bataillon blindé d’artillerie de campagne qui sert de soutien d’artillerie. On trouve également des parties du 19ème bataillon d’artillerie de campagne avec des howitzers du 818ème bataillon d’artillerie antichars, du 735ème bataillon de chars Sherman et des services sanitaires, sans oublier les compagnies d’assaut du 11thI.R. La mise en place de la force d’assaut est fortement contrariée par les différents éléments cités plus haut.

A l’aube la situation est extrêmement chaotique : le temps se dégrade avec une pluie violente et de la neige fondue, les rues sont très encombrées entre les véhicules immobilisés et ceux détruits et le commandement est très instable. Irwin s’est vu attribuer verbalement le commandement de l’opération mais le brigadier-général Thompson, commandant le CCB, l’ignore ce qui va occasionner une grosse confusion dans la chaîne de commandement. Une série d’explications verbales et houleuses va avoir lieu vu que chacun veut traverser le premier, mais pas au même moment, le tout sans hiérarchie clairement définie. Suivant cette affaire et la tentative de traversée nocturne du 23thA.I.B., Thompson sera limogé dans la journée pour abandon de tête de pont. Il ne sera amnistié et réintégré dans son grade qu’en 1948.

Les objectifs du jour, fixés vers 6h00, sont d’établir une tête de pont de l’autre côté de la Moselle. Le 2ème bataillon (11thI.R.) doit attaquer le fort St Blaise, le 23thA.I.B. doit obliquer vers le nord et attaquer Jouy aux Arches et le 3ème bataillon doit traverser plus tard et s’occuper du fort Sommy.

Faute d’embarcations l’attaque est repoussée jusqu’à leur arrivée vers 8h00, le 7th Combat Engineer Battalion étant bloqué à l’arrière dans les embouteillages. Les véhicules ayant des plaques d’immatriculations rouges sont des cibles parfaites pour les Allemands ce qui ne fait qu’aggraver la confusion dans la « descente aux enfers».
Vers 10h45 trois Cie d’infanterie plus des sapeurs tentent de rejoindre la berge à découvert. A 11h15, la Cie F du 1st lieutenant Nathan Drake embarque la 1ère sous une grêle de projectiles divers (mortiers, mitrailleuses, snipers) qui rendent la traversée à hauts risques.

En début d’après-midi les Cie F, G, une section de mitrailleuses lourdes plus des mortiers de 81mm ont réussi à traverser non sans pertes importantes. Ce qui reste du 23thA.I.B. (Cie B et C) sous les ordres du colonel Allison ne rassemble plus que 48 hommes mais ils sont également de l’autre côté. Puis vient la Cie E et en dernier la K. Il faut noter que, malgré les difficultés, l’effet de surprise donne un léger avantage aux assaillants. Les renseignements donnés par la résistance mosellane sont globalement exacts. Le GF Verdun est muet et, malgré les tirs, les défenses sont tournées. Metz n’est plus qu’à une dizaine de Km et le soutien d’artillerie et de mortiers est assez efficace. La suite sera une autre histoire.

L’établissement d’un pont pour traverser la Moselle est sous la conduite du 1103ème groupe de combat du Génie fort de 8 bataillons spécialisés. Il était prévu d’avoir un franchissement à hauteur de Dornot composé d’un pont « Tradeway » pour l’infanterie et un « Heavy Pontoon » 800m plus au sud pour faire traverser les véhicules.
Mais une difficulté imprévue apparait : il faut rajouter 200m de pont « Tradeway » pour franchir en ligne droite l’étang à hauteur de Dornot avant d’atteindre la rive opposée. Dès que les Cie du Génie entament la section entre l’étang et la berge, elles sont prises sous un tir intense des pièces allemandes, causant un carnage. De violentes contre-attaques sur le hameau du Chêne amènent le colonel Yuill à abandonner le projet et à le remplacer par un passage de bacs. Le 3ème bataillon doit se charger de l’autre traversée mais devant les difficultés rencontrées, le manque de matériel et l’opposition assez vive, celle-ci est annulée vers 16h.

Du côté allemand la situation pour le Général Krause commandant la défense de la forteresse est quasi intenable. Ses unités n’ont pas ou peu de moyens de communications et tous les messages sont transmis par coureur. Les Américains ont attaqué à la jonction des bataillons Voss et Berg ce qui crée un début de panique et laisse penser que la ligne de défense s’écroule.
Il faut dire que la qualité des troupes présentes laisse à désirer. Une patrouille du 37ème SS-Panzergrenadier Regiment est envoyée sur place et rassure le commandement.

Pour rappel, le Bataillon Berg est composé des élèves chefs de groupe des transmissions., Le bataillon Voss du 282ème bataillon d’instruction de la 462ème D.I. est quant à lui constitué de malades de l’estomac et manque d’armement lourd. Quant au 37ème SS, seul le IIème bataillon est sur place mais il possède des Halftrack SdKfz 251, 7 chars de DCA Flakpanzer SdKfz 6 avec canon de 37mm (modèle non confirmé), 2 canons d’assaut StuH de 105mm et un canon autopropulsé Sdkfz 138 de 75mm avec ses troupes de soutien spécialisées. (2)

En fin d’après-midi le 23thA.I.B. étant en sous-effectifs, sa progression vers le Nord est annulée. Il doit se maintenir en position défensive dans le bois du fer à cheval. Les compagnies F et G du 11thI.R. se mettent en mouvement vers le Fort St Blaise et progressent assez facilement sans réelle opposition. Le Lieutenant Drake commandant la Cie F est tué par un sniper en interrogeant un blessé. La compagnie atteint les extérieurs du fort sans tirer un seul coup de feu mais se trouve devant des herses de 4m de haut et un fossé de 10m de large et de 5m de profondeur environ. A ce moment là, le fort est vide comme indiqué par la résistance et ses canons hors d’état de marche mais un prisonnier le dit occupé par 1500 Waffen SS.

Le capitaine Church qui commande les deux compagnies est surpris par le silence et demande un barrage d’artillerie sur les superstructures. Plusieurs de ses hommes sont tués et blessés par les premières salves qui déclenchent la riposte allemande composée de mortiers et d’artillerie (dont celle sous tourelle de certains forts). Dans le même temps le bataillon Voss remonte vers le Nord depuis Corny et le bataillon Berg vers le Sud depuis Jouy aux Arches afin de couper la tête de pont de sa base de ravitaillement.

Dans cette situation, seul le repli en catastrophe est envisageable mais un tir croisé de mitrailleuses et de mortiers empêche la Cie G de combler le vide entre la tête de pont et la Cie F. Aucun soutien de l’arrière n’est envisageable vu les positions entremêlées des différentes forces. Le repli se fait difficilement avec des combats à la baïonnette, gêné par les vignes et les bosquets. Beaucoup d’hommes sont tués ou blessés et abandonnés là par une technique de combat SS : tirer des balles traçantes à hauteur de tête ce qui par réflexe fait couper l’effort et se jeter à terre puis un tir rasant le sol pour décimer l’adversaire. Les GI’s appelèrent cette technique le « tir aux lapins ». Pour parcourir les 2000m jusqu’à la tête de pont, il faut aux deux compagnies plus de 3h.

Se trouvent alors dans la tête de pont les 4 Cie (E, F, G, K) plus ce qui reste du 23thA.I.B. Tous se mettent à creuser un périmètre défensif, d’environ 2ha afin de tenir le bois du fer à cheval. Dans la nuit des médecins et des infirmiers sont envoyés pour secourir les blessés restés en arrière mais beaucoup sont abattus par les Allemands.

Du côté allemand, le général Krause ne sait plus où il en est. La contre-attaque est lancée vers 15h30 avec la Vème Cie du 37ème SS à Jouy aux arches et la VIIème à Corny. Des rapports alarmants arrivent des bataillons Berg et Voss qui se sentent débordés par la situation. De plus, les tirs de barrage américains causent de gros dégâts et de lourdes pertes.
Vers 18h, le Général Krause arrive à Augny pour prendre la direction des opérations et, du fort de Plappeville où il a son poste de commandement, il écrit dans son journal : « c’est la fin » (3). Un courrier du bataillon Berg lui indique même que le Fort St Blaise à été capturé. La VIIème Cie du 37ème SS est envoyée pour le reprendre mais subit les bombardements américains et ne le récupérera que vers 22h sans rencontrer d’opposition. Le GF à trompé tout le monde en cette journée du 8.

Dans la soirée la 17ème SS est renforcée par 2 Cie du 209ème bataillon de réserve ainsi que par le Ier bataillon du 37ème SS ainsi et un bataillon de transmission de la Luftwaffe transformé en infanterie. Voulant raser la tête de pont, le 37ème SS envoie une patrouille de 3 Panzers sur la route Metz-Nancy en provenance de Jouy aux Arches qui arrose le bois d’obus et de mitraille afin de tester les défenses.

Dès la nuit tombée les SS lancent une contre-attaque par heure au cri de « Yankees Kaput » mais ce mode d’assaut se révèle suicidaire et les nombreux actes d’héroïsme des GI’s causent de nombreuses pertes qui éclaircissent les rangs des assaillants.

Lors d’une accalmie, le capitaine Church donne le commandement du bois au capitaine Gerrie et traverse la Moselle pour faire son rapport au lieutenant-colonel Lemmon commandant le 2ème bataillon. Ce dernier demande à la division d’évacuer son bataillon mais ordre de tenir à tout prix lui est donné, le temps d’établir une autre tête de pont. Le 2ème bataillon est sacrifié. Aucun soutien n’est disponible et le ravitaillement et les évacuations sanitaires ne se font qu’en bateaux sous les tirs allemands.

c) Le 9 Septembre

Dans la nuit de maigres ravitaillements sont acheminés par les rares barques et zodiacs non détruits. En effet les GI’s sont partis bourrés de munitions et avec une gourde d’eau mais sans nourriture.
Or, après les durs combats de la veille, les soldats dans la tête de pont manquent de tout. Profitant de ces bateaux, les blessés sont également évacués vers le poste médical de Dornot.


Dans la matinée, le QG de la division estime que même si la tête de pont ne peut plus progresser, elle joue un rôle d’abcès dans les défenses allemandes et pourrait permettre la réussite de la traversée plus au Sud à Arnaville alors en préparation.
Un SS prisonnier affirme que le GF Verdun est réoccupé par plus de 1000 soldats ce qui provoque un mouvement de panique.
Le colonel Yuill demande vers 9h au général Irwin un appui aérien d’urgence alors que les défenseurs subissent toujours les bombardements et autres contre-attaques. (Plus de 10 pendant la nuit). Irwin téléphone à Walker qui promet de faire son possible mais à 10h45, les avions prévus sont envoyés sur Brest pour des objectifs prioritaires. Le 2ème bataillon doit subir un sacrifice total.

Dans l’après-midi, les Allemands solidement retranchés sur les hauteurs et invisibles aux yeux des avions de reconnaissance réoccupent effectivement le GF avec le Ier bataillon du 37ème SS. Le Général Krause met également sur le terrain le 208ème bataillon de réserve de la 17e SS, le IIIème bataillon et dans la soirée le IVème bataillon. Le 37ème SS est alors au complet face à la tête de pont. Krause décide d’éradiquer le point de résistance par une attaque massive de nuit à 22h45. Le choc initial est à l’avantage des Allemands qui enfoncent les avant-postes américains mais sont stoppés par la 2ème ligne. L’engagement est total et d’une grande violence, causant un carnage des deux côtés. Pourtant les Allemands font le maximum, donnant même des ordres de cessez-le-feu en anglais mais la supercherie ne fonctionne qu’une fois.

Extrait du journal de marche du 37ème SS : « 9 Septembre 1944. Malgré l’attaque enveloppante organisée contre la tête de pont de Dornot, l’appui feu reçu de nos positions de soutien et l’aide apportée par les Panzer d’assaut, il ne fut pas possible de rejeter à l’Ouest les Américains bien enterrés dans une position défensive en demi cercle sur la rive, leur moral intact malgré le pilonnement de notre artillerie et nos assaut répétés. Nous avons de lourdes pertes tant dans notre régiment que dans les bataillons d’appui nous aidant. La tête de pont ennemie se renforce de troupes fraîches en permanence. Il faut interdire par tous moyens feux ce ravitaillement avant que la tête de pont ne prenne de l’importance. » (4)

d) Le 10 Septembre

Le 10 Septembre dans la matinée le franchissement à Arnaville est en bonne voie et la tête de pont de Dornot n’a plus lieu d’être. L’évacuation est fixée à la nuit tombante mais vu que le silence radio est de rigueur, le Capitaine Gerrie est prévenu par deux nageurs qui l’informent que l’opération doit débuter à 21h15.

Le Génie utilise les rares barques et zodiacs disponibles dont certains prennent l’eau pour le transport des blessés et des cordes tendues d’un bout à l’autre servent à évacuer les valides qui se débarrassent de leur équipement pour ne pas se noyer en raison du surpoids et du courant.

L’artillerie allemande contrarie un peu les plans car une attaque massive est prévue pour 23h. Les derniers à partir doivent lancer une fusée verte pour déclencher un barrage d’artillerie apocalyptique sur le bois du fer à cheval et prendre au piège un maximum d’ennemis. Alors que l’évacuation est quasiment terminée, deux blindés sortent du bois et tirent sur les dernières embarcations, l’une explose rajoutant des victimes. Les Allemands tirent alors une fusée verte et déclenchent involontairement le barrage d’artillerie américain.

3) Bilan

Pendant ces 60 h de combats quasi ininterrompus dans des conditions météorologiques épouvantables, sans préparation digne de ce nom et avec des renseignements sur les forces ennemies assez aléatoires, la traversée de la Moselle à été un épisode très sanglant dans la bataille pour libérer Metz.

Du côté allemand, le bilan est impossible à dresser même si les attaques « suicides », la médiocrité de certaines unités et le manque de matériel plus la combativité du 2ème bataillon ont probablement coûté plusieurs centaines de morts et au moins autant de blessés, éclaircissant beaucoup les rangs des forces en présence pour la suite de la bataille.

Du côté américain, la compagnie K du 3ème bataillon ne compte plus que 50 hommes sans officier.
Le 2ème bataillon qui a engagé 3 compagnies n’a plus que 2 officiers valides et comptabilise environs 200 pertes (50% de l’effectif initial).
Le 23th A.I.B. a perdu lui aussi plus de 200 hommes en 4 jours de combats et, après l’évacuation, beaucoup d’hommes sont retirés du front pour stress. Le décompte officiel fait état de 945 tués, blessés ou disparus ce qui a donné comme surnom à ce lieu, l’OMAHA BEACH lorrain.


4) Annexes

Organigramme du XXème A.C US devant Dornot et Arnaville
QG de la division
QG des troupes spéciales
705ème compagnie de renseignements et d’éclairage (Signal Corps)
Vème compagnie de QG
Vème peloton de police militaire
Vème musique divisionnaire
Vème troupe de reconnaissance de cavalerie blindée
VIIème bataillon de combat de Génie
Vème QG d’artillerie divisionnaire
Vème hôpital chirurgical de combat

IIème Combat Team : Colonel A.Worrel Roffe
IIème I.R.
50ème bataillon d’artillerie de campagne
Cie A du Vème bataillon médical
Cie A du VIIème bataillon de Génie de combat

Xème Combat Team : Colonel Robert P.Bell
Xème I.R.
46ème bataillon d’artillerie de campagne
Cie B du Vème bataillon médical
Cie B du VIIème bataillon de Génie de combat

XIème Combat Team : Colonel Charles W.Yuill
XIème I.R.
19ème bataillon d’artillerie de campagne
Cie C du Vème bataillon médical
Cie C du VIIème bataillon de Génie de combat

Escadron C du IIIème groupe de cavalerie
21ème bataillon d’artillerie de campagne
284ème bataillon d’artillerie divisionnaire 155mm
735ème bataillon de chars moyens
818ème bataillon tanks destroyers
449ème bataillon anti-aérien

Major général S. Leroy Irwin, Commander
Brigadier général Alan D.Warnock, assistant
Chef d’état-major Colonel Paul O. Franson

Artillerie du XXème A.C US devant Dornot et Arnaville
Etat-major du XXème corps d’artillerie
Brigadier général Julius E.Slack

5ème groupe d’artillerie de campagne
695ème bataillon d’artillerie blindée de 105mm
558ème bataillon d’artillerie de 155mm automouvant
274ème bataillon d’artillerie blindée de 105mm

204ème groupe d’artillerie de campagne
177ème bataillon d’artillerie lourde de 155mm
773ème bataillon d’artillerie antiaérienne
943ème bataillon d’artillerie lourde de 155mm

33ème brigade d’artillerie de position
Etat-major du 203ème groupe d’artillerie lourde
739ème bataillon obusiers de 205mm
989ème bataillon d’artillerie de 155mm automouvant
999ème bataillon obusiers de 205mm
270ème bataillon obusiers de 240mm
277ème bataillon obusiers de 240mm

Génie du XXème A.C US devant Dornot et Arnaville
Commander: Colonel Walker
Adjoint : lieutenant-colonel Robert L.Lathan
1103ème groupe de combat du Génie composé des :

150ème bataillon de Génie de combat
160ème bataillon de Génie de combat
204ème bataillon de Génie de combat
551ème bataillon de ponts lourds
989ème bataillon de ponts légers
537ème bataillon d’éclairage de ponts
623ème bataillon d’équipements lourds
84ème bataillon de générateurs de brouillards
161ème compagnie Chemical Engineer

7th Armored Division devant Dornot et Arnaville
Général Major Lindsey H.Sylverster
Combat command B: Brigadier Général John B.Thompson/ John M.Divine

Task Force I: Lieutenant-colonel James C.Dubuisson
Task Force II: Lieutenant-colonel Robert C.Erlenbusch
31ème bataillon de chars moyens Sherman
814ème bataillon tanks destroyers
23ème bataillon d’infanterie blindée (Armored Infantry Batallion)
33ème bataillon de Génie de combat (Armored Engineer Batallion)
434ème bataillon d’artillerie blindée (Artillery Armored Batallion)

(1) Anthony Kemp, Metz 1944 page 72
(2) René Caboz, La bataille de Metz page 199
(3) René Caboz, La bataille de Metz page 209
(4) René Caboz, La bataille de Metz page 223

Sources :
Metz 1944 d’Anthony Kemp, Editions Heimdal
La bataille de Metz de René Caboz, Editions Pierron
La bataille de la Moselle de René Caboz, Editions
60 heures en enfer de l’association Thanks GI’s
La libération de la Moselle du Général Pierre Denis, Editions Serpenoise

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