La Lituanie dans la guerre
Par Antoine Merlin

La République Socialiste Soviétique (RSS) de Lituanie

Depuis le 15 juin 1940, la Lituanie, devenue une République Socialiste Soviétique (RSS), est entièrement sous le contrôle de Moscou, et dès la mise en place du régime, plus de 10 000 fonctionnaires (essentiellement des ex-fonctionnaires, instituteurs, hommes politiques et militaires) sont déportés en Sibérie, dont très peu reviendront. La mise en place progressive du régime communiste, la répression de la presse et la chasse aux "ennemis du peuple" tente de faire champ libre pour l'arrivée d'institutions copiées du modèle soviétique, suivant la fermeture de tous groupes politiques, culturels et intellectuels, et la nationalisation des industries et institutions locales.
Ces mesures, très impopulaires, sont renforcées lors de l'arrivée de "russes" en Lituanie, poussés par Moscou.
Entre le 14 et 17 juin 1941, quelques jours avant l'invasion allemande, 17 000 lituaniens furent déportés en Sibérie.

Petite note concernant la "Guerre des capitales" : Vilnius fut déclarée capitale de la Lituanie dès le 16 février 1918 (date de l'Indépendance vis-à-vis de l'Empire Russe), mais envahie plusieurs fois par les forces Rouges, et par les forces polonaises : ces dernières capturèrent définitivement la ville en janvier 1922, sous le contrôle de l'éphémère "République de Lituanie centrale", soutenue par la Pologne, et fut annexée quelques mois plus tard, malgré le fait que la Constitution lituanienne donne Vilnius comme capitale, et de ce fait, jusqu'en 1938, la Lituanie et la Pologne n'avaient aucune relation diplomatique. En 1931, la Pologne fut sommée de rendre la région à la Lituanie, mais elle refusa.
Lors de l'invasion de la Pologne par l'Armée Rouge en septembre 1939, Vilnius fut rendue à la Lituanie, et redevint sa capitale jusqu'à maintenant.
Entre 1922 et 1939, bien que Vilnius soit la capitale "légale" du pays, les autorités et Gouvernement lituanien s'installèrent à Kaunas.

Le Lietuvos Aktyvistu Frontas (LAF)

Le LAF (Lietuvos Aktyvistu Frontas), Front d’Action Lituanien, fondé par Kazys Škirpa (attaché militaire lithuanien à Berlin), tente d'organiser la résistance face à l'occupation soviétique, et planifie un soulèvement majeur, rendant l'indépendance à la Lituanie. La section berlinoise du LAF, bien que rattaché (pour certains) aux idées nazies, ne prévoie pas le rattachement pur et simple de la Lituanie au Reich, mais plutôt un état indépendant mais sous protection allemande, comme la Slovaquie. Le LAF rassemble un certain nombre de diplomates, militaires, expatriés lithuaniens en Allemagne, ainsi que des hommes politiques des partis "Union Démocratique" et "Chrétiens-démocrates" d'avant-guerre.

Malgré ce qui fut souvent dit, le LAF ne fut pas un Gouvernement "d'exil" fantoche créé par le Reich, mais bel et bien un groupe d'activistes indépendants ; ces derniers avaient relativement peu de liens avec le Parti Nazi-même, mais par contre, avaient mis en place de nombreux contacts avec l'Abwehr, notamment avec Wilhelm Canaris, et espéraient avoir des dates de l'invasion allemande de l'URSS, afin de calquer leur soulèvement à cette période, et si possible, libérer la Lituanie par les propres moyens du LAF et non par les forces allemandes.

Pourtant, il fut très difficile d'établir des liens avec les groupes du LAF installés en Lituanie-même, ces derniers agissant essentiellement comme espions, mais ne suivant pas forcément les ordres de la section berlinoise.
Le 22 avril 1941, le Gouvernement provisoire de Lituanie fut fondé, avec Kazys Škirpa comme Premier Ministre, rassemblant les deux grandes branches du LAF : celle de Vilnius et celle de Kaunas.

Le 21 juin 1941, les autorités soviétiques firent une grande "rafle" parmi les rangs du LAF, et Kazys Škirpa fut placé en résidence surveillé en Allemagne, mais malgré ces revers de dernière minute, le 22 juin, la guerre étant déclaré entre le III.Reich et l'URSS, le soulèvement débuta, appelé aujourd'hui le "Soulèvement de juin".

Pour ce qui est des juifs lithuaniens, le LAF ne se montra pas très "homogène" quant à leur sort ... si plusieurs activistes du LAF étaient des antisémites notoires, le LAF ne mis pas en place des "lois" ou "directives" quant au sort des juifs lituaniens, dont beaucoup avaient déjà été déportés par les soviétiques.
Cependant, le LAF envisagea, à terme, d'expulser les juifs de Lituanie, et bien que d'abord hésistants, ne s'opposa pas à la "chasse" aux juifs montée dès le premier jour de l'invasion.

Par contre, le LAF se montra très anti-polonais, et déclara haut et fort que les polonais en Lituanie seraient chassés sans ménagement, voir exécutés en cas de refus ... dès 1940, des activistes du LAF assassinèrent des polonais pro-soviétiques.
Un véritable "nettoyage" fut prévu dans les régions à forte population polonaise.

L'Invasion allemande

Dès mars 1941, le LAf avait publié un communiqué sous le nom de "Brangus Vergaujantieji Broliai", ou "Chers frères soumis" : ce communiqué, distribués aux membres du LAF et unités paramilitaires, expliquait ce qu'il devait être fait lors du Soulèvement, soit du sabotage des installations de l'Armée Rouge, et la prise de points stratégiques comme les gares, aérodromes, usines, routes et grandes villes, afin de faciliter l'arrivée de troupes allemandes.

Les premières attaques furent lancées le matin du 22 juin 1941, consistant d'abord en des bombardements d'aérodromes et installations soviétiques sur le territoire lithuanien, causant au moins 4000 morts chez les civils. Quelques heures plus tard, plus de 700 000 hommes traversèrent la frontière entre le Reich et la RSS de Lituanie, soutenus par 1500 véhicules blindés et 1200 appareils, appartenant essentiellement au groupe d'Armée Nord (avec des éléments du Groupe d'Armées Centre dans la région sud/sud-est).
Les soviétiques alignaient environ 400 000 hommes et 1500 chars en RSS de Lituanie, soutenus par 1344 appareils (en date du 21 juin 1941) ... la quasi-totalité de ces avions furent détruits au sol.
Les villes de Kaltinenai, Raseiniai, et Šiauliai furent rapidement prises par les Allemands, avec, tout d'abord, une résistance sporadique des forces russes, puis de violentes contre-attaques, soutenues par des chars, mais qui échouèrent face aux divisions allemandes.
Les Allemands déplorèrent la perte de 3 362 hommes (morts ou disparus), mais capturèrent un grand nombre de matériel soviétique.

Le Soulèvement lituanien

Le soulèvement débuta le matin du 22 juin 1941 à Kaunas, centre industriel du pays, suite à l'annonce de l'invasion allemande ; le LAF organisa la prise de contrôle des points-clefs de la ville, chose faite dès le 23 au matin, où l'ancien Palais présidentiel (voir "Guerre des capitales"), la station téléphonique, la station de télégraphe, la station radio et les locaux de la Poste furent sous contrôle. Ayant la plupart des moyens de communication du pays sous contrôle, un des dirigeants de la branche "Kaunas" du LAF, Leonas Prapuolenis, déclara la mise en place d'un Gouvernement Provisoire le 23 juin, à la station de radio, messages diffusés en lituanien, en français puis en allemand.

Les insurgés parviendront à s'armer après avoir attaqué des armureries soviétiques, et empêchèrent la destruction du pont routier principal sur la rivière Neris, permettant, en théorie, aux Allemands d'entrer sans encombres dans la ville.
Une Police fut rapidement mise sur pied, et un semblant d'ordre revint à Kaunas.
Les insurgés captureront même plusieurs officiers de l'Armée Rouge, ainsi que 3 véhicules blindés !
Une tentative de contre-attaque soviétique fut mise à l'échec lorsque les insurgés envoyèrent des message radio à la Luftwaffe, qui intervint presque immédiatement.
Le 25 juin 1941, les troupes allemandes entrèrent dans Kaunas en parade, accueillis par des fleurs et cris de la population et des insurgés (qui furent par ailleurs désarmés dès le 26 juin).
Les Allemands n'eurent pas de pertes lors de la prise de Kaunas, et les insurgés déplorèrent la mort d'environ 200 hommes, et autant de blessés.

A Vilnius, un grand nombre de cadres du LAF avaient été arrêtés juste avant l'invasion, le mouvement fut donc nettement moindre qu'à Kaunas : le 23 juin, la station radio de la ville, la Poste, et divers autres immeubles stratégiques sont sous contrôle des insurgés. Le 24 juin, la 7.Panzer-Division entre dans la ville.

Les deux divisions soviétiques stationnées près de Vilnius, les 184ème et 179ème Divisions de Fusiliers, durent faire face à un très grand nombre de désertions, car composées en grande partie d'ex-soldats lituaniens, intégrés après 1940 ; la 184ème Division arriva en Russie avec moins de 1000 hommes, ayant perdu les 9/10èmes de ses effectifs. Ces désertions ou tentatives de désertions entraînèrent des échanges de tir, mais la majorité des déserteurs parvinrent à rejoindre les insurgés.

Dans le reste du pays, le Soulèvement fut désorganisé, et anecdotique ... des tentatives de "copier" l'action à Kaunas furent faites à Švencionys, Utena, ainsi que dans quelques bourgades alentours.
On estime à environ 20 000 le nombre d'insurgés entre le 22 et le 27 juin 1941, avec environ 600 hommes tués, le reste étant entièrement désarmés par les Allemands, sauf quelques "brigades" de Police, servant à la liquidation de juifs par la suite.

Massacres

Pourtant, l'offensive allemande ne fut pas partout très bien perçue : dans le secteur de Krentiga, les soviétiques résistèrent de façon acharnée, avant de se retirer pendant la nuit ; les Allemands exécutèrent 40 civils comme "punition".
A la même période, 2 soldats allemands furent tués dans la ville d'Alytus : en réponse a cet acte de "terrorisme", les Allemands sélectionnèrent 40 hommes agés de 15 à 50 ans et les fusillèrent non loin de la ville.

Les soviétiques ne furent pas en reste : dès l'invasion allemande, le NKVD assassina plusieurs centaines "d'opposants" politiques dans la prison de Lukiškes, à Vilnius, dont de nombreux membres du LAF arrêtés. Bien qu'il fût initialement prévu "d'emporter" ces prisonniers en URSS, le NKVD organisa la suppression de ces hommes durant la déroute de l'Armée Rouge, ne voulant pas les "laisser" derrière eux.

Un des massacre le plus connu fut perpétré dans la forêt de Rainiai : 79 prisonniers politiques, retenus dans la prison de Telšiai, furent installés dans des camions et conduits au milieu d'un bois, où ils furent torturés de façon particulièrement atroce (mains, pieds, organes génitaux coupés, yeux et langues arrachés, brûlés vifs avec du feu et de l'acide), avant d'être exécutés ; ce massacre fut perpétré par le NKVD mais également par des unités "sélectionnées" de l'Armée Rouge, notamment la section politique de la 8ème Armée, et plusieurs cadres des prisons et unités de police militaire de la région.
Les cadavres, trouvés par les villageois, furent exhumés un peu plus loin, et seuls 27 corps purent être identifiés.
Les Allemands se servirent de ce massacre afin de dénoncer les crimes des "juifs bolchéviques", pendant que les autorités soviétiques firent passer ces hommes pour des "martyrs communistes", assassinés par les Allemands : cette version des faits ne fut jamais acceptée, et les lituaniens tentèrent d'y bâtir un mémorial, mais les travaux et tombes furent détruites lors de l'arrivée de l'Armée Rouge en été 1944, et le sujet ne pu qu'être abordé qu'en 1988-89, et le monument bâtît en 1991, suite à l'indépendance.
Depuis 1991, la Russie n'a toujours pas acceptée de livrer les responsables de ce massacre, bien que le massacre soit largement documenté, tant en Russie qu'en Lituanie.

Le 25-26 juin 1941, le NKVD liquida environ 260 personnes dans la prison de Pravieniškes, près de Kaunas : essentiellement de prisonniers politiques et "ennemis du peuple", ainsi que le personnel lituanien de la prison.

Au total, il est estimé que 769 personnes (chiffre officiel), essentiellement des prisonniers, furent tués par le NKVD lors de la retraite de juin 1941.

Les Juifs

Bien que le LAF n'est pas émit d'ordres directs, les insurgés, notamment dans la région de Kaunas, organisèrent des "rafles" parmi la population juive, et plusieurs furent exécutés.
Le 25 juin, le SS-Brigadeführer Franz Walter Stahlecker arriva à Kaunas, et poussa la population et les insurgés à dénoncer, trouver et livrer les juifs (qui représentent alors 1/3 de la population).
Plus de 4000 juifs sont exécutés à Kaunas et dans les environs, sous "supervision" allemande, mais également par le feu des partisans lituaniens.
Un des plus gros pogroms eut lieu à Slobodka, non loin de Kaunas, où des centaines de juifs furent exécutés par les insurgés d’Algirdas Klimaitis : il s'agit d'une unité paramilitaire, soutenant le Soulèvement, mais ne faisant par partie du LAF ; les dirigeants de ce dernier ne prirent pas immédiatement parti avec les nazis et les unités de Algirdas Klimaitis (qui serons par la suite rattachées aux Einsatzkommando).
Des unités du LAF, auraient, avant l'arrivée des Allemands, exécutés, surtout en campagne, un certain nombre de juifs également.


Arrestation de juifs dans la région de Kaunas ; Kaunas, comme Vilnius, étaient fortement peuplées de juifs avant la guerre, et étaient des centres culturels du judaïsme : en 1944, il ne restait quasiment rien de la population juive,
qui habitait la région depuis des siècles.

Le Gouvernement Provisoire

L'appel du Gouvernement provisoire fut fait à 9h, le 23 juin 1941, à la station radio de Kaunas.
Juozas Ambrazevicius devint le premier ministre, Škirpa étant bloqué à Berlin.
Si le pays passa entièrement sous contrôle militaire, les Allemands n’ont pas dissous le Gouvernement lituanien, et autorisa celui-ci à passer une grande quantité de lois et directives, visant à supprimer les travaux soviétiques durant l'occupation. Les Allemands laissèrent également le Gouvernement se charger du contrôle et du fonctionnement des institutions civils, et des bataillons de Police ne furent pas désarmés, mais étant généralement sous contrôle allemand.

L'autorité du Gouvernement Provisoire ne s'étendit pas à Vilnius, qui était sous contrôle du Groupe d'Armée Centre, alors que le reste du pays était administré par le Groupe d'Armée Nord.

Perdant peu à peu son pouvoir, le Gouvernement est dissout le 5 août 1941, la Lituanie passant alors entièrement sous contrôle du Reichskommissariat Ostland jusqu'en été 1944.


Reichskommissariat "Ostland", comprenant les 3 états baltes, une partie de la Pologne, et une partie occidentales de la
Biélorussie ; notez que tout est en allemand .. Libau, actuel Liepaja, Kauen. "Wilna" est à l'origine le nom de Vilnius en polonais. Sous occupation allemande, la capitaine du Generalbezirk Litauen est installé à Kaunas et non Vilnius.

Generalbezirk Litauen

Le 17 juillet 1941, le Reichskommissariat Ostland est créé sous ordre d’Hitler, comprenant, entre autres, les 3 états baltes, une partie de la Pologne, et l'ouest de la Biélorussie. Bien que cet organisme gère beaucoup d'institutions, sont pouvoir est relativement faible : d'une part, la totalité de la sécurité et contrôle militaire passe par la Wehrmacht ou la SS, tout ce qui touche aux communications et à la Poste dépendent des services du Reich, l'économie et les travaux (entre autres, les travailleurs forcés et prisonniers de droit commun) dépendant des Ministères nazis correspondants.

Le Gouvernement Provisoire est dissout le 5 août, et bannit en septembre, ainsi que le Parti Nationaliste Lituanien (en novembre 1941). Plusieurs de ces chefs sont envoyés dans des camps de Concentration, et plusieurs dirigeants sont toujours bloqués en Allemagne et emprisonnés en URSS.
Cependant, plusieurs membres du Gouvernement Provisoire seront intégrés au "Generalbezirk Litauen", section lituanienne de "l'Ostland", commandée par Adrian von Renteln.

Comme dit ci-dessus, son pouvoir est assez faible, ne faisant qu'organiser les institutions civiles, quelques organisations spécifiques, et l'administration locale ; les Allemands n'ayant pas assez d'hommes, la plus grande partie des fonctionnaires sont des lituaniens, sous contrôle de hauts-dirigeants allemands.

Holocauste en Lituanie

L'Holocauste lituanienne fut l'une des plus terribles en Europe : sur les 208 000 juifs vivants en Lituanie en 1940, moins de 14 000 survécurent à la guerre ; environ 196 000 fut assassinés par l'Einsatzgruppe A, dans les ghettos, divers camps et liquidations entre juin 1941 et été 1944, soit plus de 95% de la population juive éliminée pendant cette période.

Outre l'organisation allemande à ce niveau, ces derniers bénéficièrent de l'aide quasi-totale des autorités lituaniennes : l'antisémitisme était déjà largement ancré dans ces régions en 1940, mais l'arrivée des soviétiques, mise sur le compte des actions juives, ne fit que renforcer ce sentiment, et les divers groupes de résistance, LAF en tête, ne cachèrent pas leur antisémitisme durant cette période.

Les premiers massacres datent du 25-26 juin 1941, perpétrés par les insurgés lituaniens d’Algirdas Klimaitis dans la région de Kaunas, bien qu'il soit probable qu'ils aient débutés avant l'arrivée allemande.
Entre juillet et décembre 1941, l'essentiel des juifs lituaniens sont tués par balle, par les Einsatzgruppen et leurs auxiliaires lituaniens, environ 175 000 personnes.
Le massacre dit de "Ponary", non loin de Vilnius, fut perpétré par l'Einsatzkommando 9, et leurs aides lituaniens : environ 70 000 juifs y furent tués, ainsi que 20 000 polonais (installés dans la région depuis son annexion à la Pologne), et environ 7500 prisonniers de guerre soviétiques.
Malgré les tentatives allemandes de "cacher" ce massacre en fin 1943, il fut bientôt connu des autorités soviétiques.

Un massacre similaire eut lieu près de Kaunas, par l'Einstzkommando 3 (sous les ordres de Karl Jäger).

A partir de 1942, les juifs restants sont considérés comme une main d'œuvre potentielle, et les 45 000 juifs encore vivants sont enfermés dans des Ghettos, tel que celui de Kaunas ou de Kovno, ou des camps de travail. Des prisons, tel que Pravieniškes, servirent de locaux aux terribles Einsatzkommando et aux partisans pro-nazis lituaniens.
Locaux qui avaient servis, avant 1941, au NKVD, et qui reprirent du service après 1944 !!

En juin 1943, Himmler ordonne que les ghettos restants soient liquidés en toute urgence, ce qui se traduira par un véritable massacre à Kaunas, appelé "Massacre de la 9ème Tour", correspondant au Fort de Kaunas, dans lequel des centaines de gens furent enfermés et exécutés.
Lors des retraites allemandes, les ghettos seront brûlés, et les derniers juifs seront envoyés en Allemagne, en marches forcées, dans des camps tels qu'Auschwitz ou Dachau, où ils seront libérés par les soviétiques.

Outre les juifs, les massacres, tel que Ponary, concernèrent également des polonais (auxquels était voué une haine particulièrement féroce, haine poussées par le LAF également), des prisonniers soviétiques, mais aussi, des tsiganes, ainsi que des hommes politiques lituaniens anti-nazis/communistes lituaniens. Plusieurs juifs allemands auraient également été assassinés en 1943 lors des dernières "liquidations", ainsi qu'au fort de Kaunas (où plusieurs juifs français furent également internés).

« Avenir » de la Lituanie dans « l’Ostland »

Les plans allemands quant à la situation de la Lituanie « après-guerre » sont parfois contradictoires :
tout d’abord, les lituaniens, bien que n’étant pas des « aryens », ne sont pas considérés comme des « sous-hommes », mais restent à « germaniser ». De plus, la population lituanienne doit être « purifiée », notamment par l’arrivée de colons allemands : on prévoit une colonisation de la Lituanie à peine 20 ans après la fin de la « guerre » contre le bolchévisme. De même, il devient urgent d’éliminer la juiverie-bolchévique de la Lituanie.

En bref, la Lituanie aurait du devenir partie intégrante de l’Ostland allemande, germnaisée par l’arrivée de milliers de colons allemands.

Cette colonisation n’eue pas vraiment le temps de se mettre en place, bien que des Allemands aient déjà déménagés dans la région de Memel, et que la population allemande soit plus nombreuse dans certaines régions.
La plupart seront expulsés en 1945, mais en bien plus faible « nombres » qu’en Pologne ou en Tchécoslovaquie.


Synagogue brûlée le 9 juillet 1941, observée par des soldats allemands et des lituaniens. La "suppression" des juifs de Lituanie sera l'un des premiers actes de la "purification" du pays, et sera quasiment achevée alors que la Solution Finale n'a pas encore été mise en place ! En Lituanie, l'écrasante majorité des juifs furent assassinés par balles et non dans des vastes camps comme Treblinka ou Auschwitz !

Résistance

Les premiers mouvements de résistance opérant en Lituanie furent des groupe de Partisans polonais, ainsi que des partisans soviétiques (soldats et communistes lituaniens). Leurs actions prirent de l'ampleur en 1943, lorsque plusieurs tentatives de soulèvement dans les Ghettos (notamment celui de Vilna) eurent lieues, sans succès. Les partisans polonais furent chassés avec acharnement par les bataillons de "défense" lituaniens, aidés par les Allemands, et menèrent parfois à un véritable nettoyage "ethnique" dans la région de Vilnius, toujours en rapport avec l'occupation polonaise de ce territoire ; en début 1944, les partisans polonais assassinèrent des centaines de policiers et collaborateurs lituaniens, ces derniers répondant par des destructions systématiques de village "polonais".

Les Partisans polonais tenteront également de bloquer les renforts allemands, notamment la 3.Panzer-Armee, en juillet 1944, lors de la contre-offensive allemande sur les forces soviétiques encerclant la garnison de Vilnius (l'opération fut un échec, les Allemands parvenant à établir un couloir avec la garnison de Vilnius).

Côté lituanien, le Vyriausias Lietuvos išlaisvinimo komitetas (VLik), ou Comité Suprême de la Libération de la Lituanie, distribua tracts, mais ne parvint pas à s'imposer en Lituanie-même : par contre, il noua de très bons liens en Europe de l'Ouest, si bien qu'il représentait, aux yeux de certains, le seul Gouvernement lituanien valable, avant l'arrivée des soviétiques.

Waffen-SS et Litauische Sonderverbände

Contrairement aux autres états baltes, la Waffen-SS ne parvint pas à lever une division en Lituanie : en 1943, l'occupant allemand est de moins en moins bien perçu, et seuls 300 hommes sont reportés comme "volontaires".
Ce manque de succès obligèrent les autorités nazies à accepter la création de la Lietuvos vietine rinktine (LVR), Force lituanienne de défense, ou "Litauische Sonderverbände" : 10 000 furent rapidement rassemblés, sous le commandement du Général Povilas Plechavicius. Le 13 février 1944, l'unité est officiellement "autorisée" par les Allemands, avec des officiers lituaniens et des uniformes spécifiques.
Le 16 février, fête nationale du pays, un appel radio et une propagande particulièrement efficace parvient à rassembler entre 25 000 et 35 000 volontaires !
Les Allemands, d'abord étonnés de tant de succès, se montrèrent méfiants vis-à-vis des "lituaniens", et retardèrent au possible la livraison de fusils, munitions et autres armements.

Le 22 mars 1944, le SS-Obergruppenführer General Friedrich Jackeln fit appel aux autorités de la LVR afin de regroupe rentre 60 000 et 70 000 lituaniens afin de servir d'auxiliaires pour le Groupe d'Armées Nord : ces derniers auraient servis à garder installations à l'arrière, gares, aérodromes et bases navales, libérant ainsi leurs homologues allemands.
Face au refus de Plechavicius, les Allemands lui ordonnèrent de mobiliser le pays le 6 avril, mais celui-ci refusa tant que sa LVR ne soit pas prête au combat.
La LVR servit, pendant ce temps, à chasser les partisans, notamment polonais dans le sud-est du pays, commettant plusieurs massacres.

Les tensions montèrent entre Plechavicius et les Allemands, ces derniers réclamants des hommes, et le contrôle de la LVR. Le 9 mai 1944, une tentative de mobilisation échoua, et Jackeln tenta de faire passer la LVR sous son contrôle, en l'intégrant soit aux unités de la Heer sur place, soit au sein de la Waffen-SS, les obligeant de facto à reconnaître son autorité.

Le 12 mai, Plechavicius ordonna à ce que les cadets de la LVR retournent chez eux, pendant que les unités en opération retournent à leurs casernes. Une dissolution fut envisagée. Une proposition allemande d'envoyer la LVR à l'Ouest fut refusée.
Du 13 au 14 mai, une bataille, connue sous le nom de "Murowana Oszmianka ", vit plus de 300 soldats de la LVR se faire capturer ou tués par l'Armée de Libération polonaise.
Le 15 mai, Plechavicius et son état-major sont arrêtés, et envoyés dans le camp de Concentration de Salaspils, en Lettonie, ainsi que 52 autres officiers.
106 cadets furent envoyés au Stutthof, et 983 soldats à Oldenburg. Environ 200 soldats du LVR furent publiquement fusillés, dont 12 à Vilnius, par les forces allemandes.
A l'école d'officiers de Marijampole, une fusillade éclata lors de la tentative de désarmement. Relativement peu de bataillons furent entièrement désarmés par les Allemands, et nombre de soldats disparurent dans les bois, créant ce qui deviendra un groupe de résistance organisé contre l'envahisseur soviétique.
Environ 3500 hommes seront intégrés comme unités auxiliaires dans la Wehrmacht, notamment en Ukraine, servant à la garde d'installations à l'arrière du front. D'autres furent envoyés en Allemagne comme travailleurs forcés.

Invasion soviétique

Comme prévu par les plans de "Bagration", les Armées soviétiques rentrent en Lituanie dès fin juin 1944. Le 3ème Front de Biélorussie, suivant l’opération Bagration lancée le 22 juin 1944, composé des 5, 31, 33, 39ème Armées, de la 11ème Armée de la Garde et de la 5ème Armée Blindée de la Garde, lança son attaque sur la capitale lituanienne, la capturant le 14 juillet 1944, capturant la plus grande partie de la garnison allemande (environ 11 000 hommes) malgré la tentative de la 4.Armee et de la 3.Panzer-Armee d’établir un couloir entre la garnison et le front (chose faite pendant quelques heures, permettant à environ 3000 soldats de quitter la ville.

A partir du 28 juillet, le 3ème Front de Biélorussie relance son offensive, dirigée vers Kaunas, et devant atteindre la Prusse-Orientale et d’y établir des positions défensives.
L’attaque soviétiques bouscula les forces allemandes, et capturèrent la ville de Kaunas le 1er août. Les soviétiques pénétrèrent profondément en Lituanie, sur des dizaines de kilomètres, séparant peu à peu le Groupe d’Armées Nord, positionné en Lettonie et Estonie, et le Groupe d’Armée Centre, en Pologne, ayant subit de plein fouet l’offensive soviétique.
La progression cessa le 29 août, lorsque les unités de l’Armée Rouge s’approchèrent de la Prusse Orientale, face aux lignes fortifiées allemandes à Raseiniai et Kybartai.
Les tentatives de contre-attaques allemandes (opérations Doopelkopf et Cäsär) permettent de conserver un étroit « couloir » entre le Groupe d’Armée Centre et le Groupe d’Armée Nord, et sont parmi les dernières opérations « offensives » allemandes à l’Est, et qui se terminent pas une victoire tactique (relative toutefois, au vu de la situation générale sur l’Ostfront).

Le 5 octobre 1944, le 1er Front de la Baltique (33, 43 et 51ème Armées, 5ème Armée Blindée de la Garde et 6ème Armée de la Garde), commandé par le Général Hovhannes Bagramyan enfonce les lignes de la 3.Panzer-Armee (XXXX Panzer-Korps et XXVIII Armee-Korps), commandé par Erhard Raus. Le 7 octobre, les forces allemandes reculent.
Le 9 octobre, la ville de Memel (actuellement Klaipeda) est encerclée, et le XXVIII Armee-Korps y est piégé. Les Allemands organisent alors une défense étoffée, et le siège de Memel dur jusqu’au 28 janvier 1945, date à laquelle les dernières unités allemandes ont quittées la ville par mer, suite à l’offensive soviétique en Prusse-Orientale : il s’agit de la dernière portion de territoire lituanien a être libéré de troupes allemandes.

Mais depuis déjà plusieurs mois, la RSS de Lituanie a été rétablie, et va durer jusqu’au 11 mars 1990. Outre les déportations entre 1940 et 1941, les déportations allemandes, entre 200 000 et 300 000 lituaniens seront déportés après le rétablissement de la RSS.
Des mouvements de résistance contre les forces soviétiques dureront jusqu’au début des années 50, la plupart issus de la LVR (Force de Défense Lituanienne) et des partisans pro-nazis lituaniens, alors que Staline mettra des hommes particulièrement cruels à la tête de la nouvelle Lituanie.


Blason de la RSS de Lituanie : "Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !" est visible à gauche, en lituanien, et à droite, en russe.

Notes :
(1) Franz Walter Stahlecker, qui commanda l'Einsatzgruppe A, Groupe qui agissa notamment dans les états baltes ; sous son commandement, plus de 250 000 juifs furent tués en date du 1er janvier 1942.
En juin 1941, il organisa les massacres près de Kaunas, et poussa les insurgés du LAF à faire de même.
Il sera tué lors d'une embuscade partisane en Russie, le 23 mars 1942.

(2) Kazys Škirpa (1895-1979), représentant la Lituanie en Allemagne et à la Ligue des Nations pendant les années 30. Lors de l'annexion de 1940 à l'URSS, il est l'un des fondateurs du LAC, et est nommé Premier Ministre du Gouvernement "en exil".
Le 22 juin 1941, il est retenu en résidence surveillée par les Allemands. En 1944, il est envoyé au camp de concentration de Bad Godesberg, puis libéré en 1945. D'abord à Paris puis à Dublin, il finit par travailler à la Libraire du Congrès américain. Il meurt à Washington DC en 1979, après la rédaction de ses mémoires quant à la fondation du LAF.

(3) Général Povilas Plechavicius : homme politique important dans les années 20 et 30, il fuit en Allemagne lors de l'invasion soviétique.
Fondateur de la LVR, il refusa de la faire passer sous contrôle allemand, et empêcha la mobilisation des lituaniens par les autorités allemandes. Il fut déporté à Salaspils, en Lettonie, et s'exile à Chicago en 1949.

Sources :
http://ieskok.penki.lt
http://www1.yadvashem.org
http://www.findagrave.com
http://www.vilnaghetto.com
http://www.axishistory.com
http://www.bernardinai.lt
Wikipédia (en anglais et en lituanien)

Menu