Plus
de vingt ans après la fin de la Grande Guerre, le second conflit
mondial débute de façon particulière : sans déclaration
de guerre préalable, l’Allemagne débute une invasion
rapide et violente de la Pologne. Ce choix n’est pas dû
au hasard, pas quand on sait les risques que court le Reich, pas plus
que la stratégie utilisée est irréfléchie.
Nous allons donc étudier à la fois la réflexion
qui mena à cette attaque et les moyens mis en œuvre pour
la réussir, le déroulement des opérations et les
diverses réactions parallèles à cette action.
Les relations
germano-polonaise jusqu’en 1938
L’état Polonais de 1939 est relativement jeune : il est
proclamé le 3 novembre 1918 par des nationalistes polonais, qui,
voyant que les nations d’Europe Centrale s’effondrent, constituent
un Conseil de Régence donnant le pouvoir à Jozef Pilsudski,
ancien dirigeant des troupes polonaises de l’armée Autrichienne.
Un gouvernement est formé avec l’aide d’Ignace Paderewski
et d’autres dirigeants polonais de retour d’exil le 17 janvier
1919. Néanmoins, les frontières définitives du
pays ne seront tracées que bien plus tard, par trois traités
différents (Versailles le 28 juin 1919, Saint Germain le 10 septembre
1919 et Riga le 18 mars 1921).
Le point important de ce dessin, est l’existence d’un corridor
donnant à la Pologne un accès à la mer, au niveau
de la ville de Dantzig. Ce couloir coupe littéralement le territoire
allemand en deux, séparant la Prusse Orientale du reste du territoire.
De plus, la ville est peuplée majoritairement par des allemands,
et est un port important.
A l’origine ville libre sous autorité polonaise, la cité
est rapidement investie complètement par la Pologne, appuyée
par la France, et ce malgré les vives protestations allemandes.
La situation n’évolue pas dans les années qui suivent,
à cause des troubles économiques et sociaux minant l’Allemagne.
Mais avec l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933,
cette relative bonne entente semble être remise en cause. Et pourtant,
le 26 janvier 1934 est signé un pacte de non-agression entre
les deux nations, sensé durer 10 ans, dans le but, selon Hitler,
"d’améliorer [ces] relations dans l’intérêt
de paix". Le dirigeant nazi réaffirme l’importance
de ce traité le 30 janvier 1937 devant le Reichstag, malgré
qu’il ait remis en place la conscription et réorganisé
la Wehrmacht.
L’annexion des Sudètes et la crise tchèquoslovaque
fit douter au monde entier des véritables intentions d’Hitler.
Mais la Pologne, bien que prudente, profita de la situation pour annexer
la zone industrielle de Teschen le 2 octobre 1938, une province appartenant
théoriquement à la Tchèquoslovaquie.
La crise du Corridor
de Dantzig et l’échec de la diplomatie
Le 24 octobre 1938, le ministre des affaires étrangères
du Reich Joachim von Ribbentrop commença à sonder l’opinion
du gouvernement polonais sur le couloir de Dantzig. Il proposa que Dantzig
reviennent à l’Allemagne, tout en laissant aux polonais
des accès routiers et ferroviaires, et demande aussi la construction
d’une voix ferrée traversant le corridor.
En échange de ces concessions, le Reich garantirait les frontières
et étendrait de 25 ans le pacte de non-agression.
Le gouvernement polonais rejeta cette offre.
En mars 1939, des évènements politiques en Tchéquoslovaquie
mènent à l’indépendance de la Slovaquie (qui
se placera sous la protection du Reich) et à la dissolution de
l’état, la Bohème-Moravie étant occupée
par le Reich dès le 15 mars.
Dès lors, le Premier Ministre anglais Neville Chamberlain s’inquiète,
et le 31 du même mois, il déclare devant la Chambre des
Communes que la France et la Grande Bretagne assisteraient la Pologne
en cas d’attaque.
La Pologne se décide à n’accepter aucune proposition
allemande, craignant que si elle cédait elle subirait le même
sort que la Tchéquoslovaquie
Le 28 avril, Hitler dénonce devant le Reichstag le traité
de non-agression avec la Pologne. Il y alors, théoriquement,
un préavis de six mois avant que les hostilités ne puisse
éventuellement débuter.
Le dirigeant nazi annonce de plus que le problème de Dantzig
doit être résolu. A la même période, à
Dantzig, la propagande fait rage, et la population se soulève
de plus en plus.
Après avoir eu l’assurance de la "neutralité
amicale" des Italiens le 22 mai, il ne reste plus à Hitler
que d’obtenir au moins aussi bien de la part de Moscou, qui sera
obtenu le 23 août. Mais auparavant, Hitler a préparé
les "incidents" qui lui permettront d’obtenir un casus
belli avec l’aide de Reinhardt Heydrich, et Dantzig a été
infiltrée par des agents SS et militaires en civils, pour entretenir
les troubles.
Le 29 août à 19h15, von Ribbentrop envoit un ultimatum
à la Pologne par le biais de l’ambassadeur de Grande-Bretagne,
Mr. Henderson.
Un envoyé plénipotentiaire devait se rendre à Berlin
avant le lendemain à minuit pour négocier un arrangement.
C’était mission quasiment impossible, et aucun envoyé
n’apparut. Ribbentrop s’entretint alors avec les ambassadeurs
de Pologne et de Grande-Bretagne, pour leur signifier les demandes de
son gouvernement : un plébiscite devait être tenu dans
la région du Corridor, et Dantzig devait être restituée
au Reich sans conditions. Il ajouta que les négociations étaient
finies.
Tout cela fut fait sans aucun respect des traditions diplomatiques :
aucun traducteur n’était présent, et aucune copie
écrite de la déclaration ne fut distribuée, comme
le voulait l’usage.
Dès lors, il n’y avait aucune autre alternative pour Hitler
que de lancer la guerre pour laquelle il s’était préparé
depuis le mois de mai. Le 31 août, le Führer signe la "Directive
N°1 sur la conduite de la guerre", fixant l’heure de
l’attaque sur la Pologne pour 4h45 le lendemain matin.
Les positions
défensives polonaises
Erich von Manstein, à l’époque chef d’état
major du groupe d’armée Sud, donne dans ses mémoires
la description suivante des forces polonaises . En temps de paix, les
forces sont décrites à trente divisions d’infanterie,
onze brigades de cavalerie, une division de Montagne, deux brigades
motorisées, auxquels s’ajoutent des corps de défenses
de frontières et des bataillons de Garde Nationale (O.N.), ainsi
que quelques troupes navales stationnées à Gdynia-Hel.
En sus, l’armée polonaise dispose d’un millier d’avions.
Cette force assez importante est néanmoins victime de l’ancienneté
de son matériel. Les chars sont en nombre peu important et sont
pour la plupart du matériel léger. Les avions sont assez
vieux et peu fiable.
La doctrine polonaise est elle aussi en retard. Mais le pays dispose
d’importantes ressources humaines.
L’OKH estime que la Pologne peut doubler le nombre de division
disponible en promulguant la mobilisation générale. Dans
les faits, seules une dizaine de division de réserve purent être
rassemblées et équipées avant la fin des hostilités.
Le Haut-Commandement Polonais a disposé ses forces selon la stratégie
basique, et dépassée, de défendre les frontières,
en ne faisant aucune concession territoriales. Ainsi, les forces sont
étalées sur les milliers de kilomètres de frontières
avec l’Allemagne. En Prusse Orientale, sur la ligne Bobr-Narew-Vistule,
un regroupement de deux divisions d’infanterie et de deux brigades
de cavalerie sont rassemblés entre Suwalki et Lomza, protégeant
l’aile droite de l’armée Modlin, disposant elle de
quatre divisions d’infanterie et de deux brigades de cavalerie
postée à Mlawa.
L’armée Pomorze, protégeant le corridor de Dantzig,
possède une division d’infanterie en plus et une brigade
de cavalerie en moins. Postée sur l’ouest de la Vistule,
elle protège le corridor sur une ligne allant des villes allemandes
de Stolp à Schneidemühl.
Du fleuve Warta à la Slovaquie, trois armées protègent
les frontières, appuyées par une quatrième dans
les terres.
A l’ouest de Poznan, l’armée du même nom à
le même effectif que celle de Modlin, tout comme celle plus au
sud, à Wielun, l’armée Lodz. L’armée
de Cracovie à la charge du plus grand front, entre Czestochowa
et Nowy Tary à la frontière germano-slovaque. Elle dispose
pour cela de six divisions d’infanterie, d’une brigade de
cavalerie et d’une brigade motorisée. Enfin, à l’ouest
de Radom, entre Kielce et Tomaszow, s’est réuni l’armée
de Prusse, avec les mêmes forces que la précédente,
la brigade motorisée en moins.
Enfin, l’armée des Carpathes protège l’accès
via la Slovaquie au territoire Polonais. Elle ne dispose pour cela que
de divisions de réserves et de bataillons de la Garde Nationale.
Pour finir, les seules réserves de l’armée polonaises
sont aux alentours de Varsovie (de Modlin à Lublin), et ne disposent
que de trois divisions d’infanterie et d’une brigade motorisée
postées sur la Vistule.
Mais Manstein décrit ici le rapport de renseignement dont dispose
l’OKH (Oberkommando der Wehrmacht) en avril 1939.
Les archives polonaises nous donnent plus de précisions sur le
dispositif au 1er septembre. Ainsi l’armée Modlin ne dispose
en réalité que de deux divisions d’infanterie et
deux brigades de cavalerie, mais a bien une réserve de trois
divisions qu’elle partage avec l’armée Narew. Les
armées Poznan et Lodz sont estimées correctement mais
disposent à elles deux d’une réserve de deux divisions
d’infanterie. L’armée de Cracovie est sous estimée
par l’OKH. Elle ne possède pas six mais sept divisions
d’infanterie. L’armée de Prusse quant à elle
est en réalité une réserve générale,
dotées de 8 divisions d’infanterie, d’une brigade
de cavalerie et surtout d’une brigade blindée. Enfin, l’armée
des Carpathes est bien plus puissante qu’imaginée :
elle dispose de trois brigades de montagne, et d’une réserve
de deux divisions d’infanterie ! Il y a donc trente-neuf divisions
d’infanterie disponible au 1er septembre. Pour la défense
des officiers de renseignements de l’OKH, une partie de ces divisions
étaient des divisions de réserves partiellement et peu
à peu mobilisées à partir du 23 mars.
De plus, la Pologne a calqué son système de conscription
sur le modèle français. Une mobilisation générale
de la classe 1898-1915 (24 à 42 ans) permettrait ainsi de lever
un million et demi d’hommes plus ou moins formés, et une
seconde vague de la classe suivante (43 à 52 ans) apporterait
560 000 hommes en plus, bien que moins utiles sur le plan militaire.
Von Manstein analyse et critique le positionnement stratégique
polonais. En effet, d’après lui, ce type de défense
surannée finit classiquement par la victoire de la plus importante
force militaire, surtout face aux tactiques allemandes. Le Général
Weygand aurait conseillé au gouvernement polonais quelques années
avant la guerre de changer de dispositif et de déplacer le front
sur les défenses naturelles formées par les rivières
Niemen, Bobr, Narew, Vistule et San, afin de réduire la mobilité
des chars allemands et d’éviter tout encerclement par les
forces venues de Prusse Orientale . Le problème de cette solution
était qu’il donnait à l’Allemagne à
la fois le Corridor de Dantzig, mais aussi toutes les zones vitales
d’industrie et de l’agriculture polonaise. Début
1938, le Général Kutrzeba, Directeur de l’Académie
Militaire Polonaise avait envoyé un mémorandum au Maréchal
Rydz-Smigly lui faisant part d’une troisième possibilité
permettant de sauver l’ouest du pays et ses activités stratégiques.
Reconnaissant l’infériorité de l’armée
polonaise face à la Wehrmacht, il proposait la construction d’une
succession de fortification de Grudziadz à Poznan, et le long
de la frontière en Silésie, d’Ostrowo à Cieszyn
en passant pas Czestochowa. Le coût de tout cela était,
malheureusement pour la Pologne, bien trop élevé, et les
possibilités industrielles du pays trop limitées. De plus,
l’annexion des Sudètes puis du reste de la Tchéquoslovaquie
mit fin à tout espoir de construction par un pays extérieur.
La principale raison de cette stratégie tient principalement
du fait que la Pologne n’avait pour but que de gagner du temps,
de retarder l’avancée des troupes du Reich le temps de
l’intervention des Français et des Britanniques à
l’ouest, intervention qui n’eût jamais lieu.
Le dispositif
allemand et le plan "Fall Weiß"
L’invasion de la Pologne nécessite la mobilisation d’importantes
forces, c’est un pays avec une capacité de défense
non-négligeable, et très étendu. Mais c’est
aussi un pays dont l’indépendance est théoriquement
garantie par la France et la Grande-Bretagne. Hitler décide de
courir le risque d’une guerre avec l’Ouest, en comptant
sur l’hésitation des dirigeants étrangers à
entrer dans un long conflit avec l’Allemagne.
Il est important de noter ici le déséquilibre flagrant
du front Ouest, montrant à quel point la situation du Reich serait
délicate si la France décidait d’agir. Juste avant
l’invasion, les forces françaises sont évaluées
à quatre-vingt-dix divisions, et, en l’espace de trois
semaines lors de la mobilisation générale, ce sont 108
divisions qui seront levées ! Avec l’immense avantage d’être
déjà formés pour leur grande majorité .
Face à cela, même après la mobilisation générale,
et tant que la Pologne ne sera pas pacifiée, la Wehrmacht ne
pourra pas aligner plus d’une quarantaine de divisions.
Il faut donc un plan permettant la fin rapide du conflit à l’Est.
"Fall Weiß" est né des stratèges de l’OKW
suite à la directive annuelle de l’armée du 3 avril
1939. Chaque armée dût à la suite de cette première
ébauche nommer un ou plusieurs états-majors pour diriger
les opérations. La Heer choisit les généraux Fedor
von Bock (Heeresgruppenkommando 1) et Gerd von Rundstedt (Arbeitssbab
Rundstedt). La Kriegsmarine nomme le Marinegruppenkommando Ost (commandement
de la Marine Est) et la Luftwaffe les 1. et 4. Luftflotte (General der
Flieger Albert Kesselring et Alexander Loehr).
Parallèlement, chaque service travaille à l’élaboration
d’une partie du plan, le tout étant présenté
à Hitler les 26 et 27 avril.
Le concept plait au Führer : une attaque par deux groupes d’armées,
au nord et au sud, détruisant l’ennemi dans l’Ouest
du pays et capturant Varsovie. Les différents états-majors
retenus sont prévenus et la machine se met en marche. Ils se
mettent au travail pour préciser le déroulement des opérations.
Bock et Rundstedt envoient leurs recommandations à l’OKH
fin mai. Le 15 juin est envoyé le premier ordre opérationnel.
Il demande aux états-majors de poursuivre les préparatifs
selon le plan indiqué, et de mettre au point les détails
de leur coor-dination avec la Luftwaffe. Tout doit être bouclé
le 20 juillet.
Le plan final reprend donc le concept original. Le centre sera dégarni
de forces au profit du nord et du sud. Deux groupes d’armées
(Heeresgruppen) seront donc formés. Le Heeresgruppe Nord, dirigé
par le GeneralOberst von Bock (avec le General von Salmuth comme chef
d’état-major) commandera la 3. et la 4. Armee. Le Heeresgruppe
Süd disposera des 8., 10., et 14. Armee et sera dirigé par
le GeneralOberst von Rundstedt. Des gardes frontières et des
réservistes seraient postés au centre du front pour faire
écran et bloquer toute contre-attaque polonaise.
La 3. Armee, dirigé par le General der Artillerie Georg von Küchler,
sera placée en Prusse Orientale et comporterait huit divisions
d’infanterie, une brigade de Panzern et une brigade de cavalerie.
Son effort majeur sera l’attaque sur Varsovie, une force moins
importante étant dévolue à soutenir la 4. Armee
dans son franchissement de la Vistule.
Cette dernière est dirigée par le General der Artillerie
Günther von Kluge. Elle sera postée à l’entrée
du Corridor, de la mer au fleuve Warta. Elle comporterait six divisions
d’infanterie dont deux motorisées et une division de Panzer.
Elle attaquera vers le Sud et l’Est pour couper les forces polonaises
placées près de Dantzig de leurs renforts et sécuriser
les voies de communications entre l’Allemagne et la Prusse Orientale.
Cette tâche accomplie, elle joindrait la 3. Armee pour son attaque
sur Varsovie, la prise de Dantzig étant dévolue aux réservistes
allemands déjà présents en ville.
La 10. Armee constitue le fer de lance du Heeresgruppe Süd. Sous
le commandement du General der Artillerie Walther von Reichenau seraient
placées six divisions d’infanterie, deux d’infanterie
motorisées, deux de Panzern et quatre divisions légères,
faisant de cette force l’armée la plus importante de l’ordre
de bataille allemand. Depuis sa position initiale sur la frontière
entre Oels et Gleiwitz, elle devra enfoncer les lignes ennemies et détruire
l’armée polonaise bloquée en arrière par
la 3. Armee.
La 8. Armee, dirigée par le General der Infanterie Johannes Blaskowitz
couvrira son flanc gauche avec quatre divisions d’infanterie.
Son objectif principal sera de neutraliser les forces ennemies connues
dans les environs de Poznan-Kutno, en partant de la frontière
entre Glogau et Oels.
La 14. Armee couvrira le flanc droit de la 10. Armee, sous le commandement
du Generaloberst Wilhelm List, avec comme forces cinq divisions d’infanterie,
une légère et deux divisions de Panzern. En partant de
Gleiwitz jusqu’aux montagnes slovaques, elle devra mettre un coup
d’arrêt aux armées polonaises venant de Galice et
de Lwow.
Par ce mouvement d’enveloppement, le Heeresgruppe encercle l’armée
polonaise dans l’ouest du pays, empêchant par la même
occasion la levée des réservistes, alors que le Hee-resgruppe
Nord bloque le nord et la route vers l’est du pays menant aux
marais de Pripyat. La 1. Luftflotte appuiera le Heeresgruppe Nord et
la 4. Luftflotte le Heeresgruppe Süd.
Le plan n’évoluera plus jusqu’au lancement des hostilités,
bien que le 1er septembre, l’ordre de bataille soit légèrement
différent dans la répartition des divisions, suite aux
remarques des différents états-majors.
Les préparatifs…
et les balbutiements
Parallèlement au développement du plan "Fall Weiß",
l’OKW met en place les préparatifs de la guerre. Pour cela,
une série de date clés sont décidées, relativement
à un jour "Y", encore non déterminé mais
basé sur le 23 août, étant le jour auquel où
tout devra être prêt. Ce calendrier sera néanmoins
réservé à la coordination des derniers jours avant
l’attaque.
Auparavant, dès la mi-août, la machine logistique allemande
s’est mise en marche. Des trains de la Reichbahn cessent peu à
peu leur service régulier pour transférer les troupes
vers leurs zones de stationnement. Le régime de guerre ne sera
néanmoins appliqué qu’à partir de "Y-1".
Les autoroutes sont surveillées et sécurisées,
le trafic téléphonique et télégraphique
est réduit à son minimum.
Les précautions sont prisées pour couper toute télécommunica-tions
avec la Lituanie et la Pologne à minuit le jour "Y".
Des stocks de provisions sont créés et gérés
par chacun des Wehrkreis (régions militaires) accueillant une
armée.
Des rations, des munitions, du carburant, des pièces détachées
pour tous types de véhicule, de l’équipement pour
les pontonniers et du fourrage pour les animaux sont entreposés.
Quatre dotations journalières doivent être mises à
disposition : une sur le personnel (ou son transport), une dans les
dépôts de munitions de l’armée dont il dé-pend,
et deux autres prêts à avancer là où il y
en aurait besoin.
Les troupes stationnée en Prusse Orientale, de part leur isolement,
disposent elle de six dotations journalières. Les véhicules
ont à leur immédiate disposition de quoi faire 750km.
Des points de rassemblements de prisonniers de guerre sont décidés,
et les futurs emplacements des hôpitaux de campagne sont choisis.
Les déplacements de troupe se font progressivement à partir
du 26 juin. Les derniers mouvements commencent le 23 août, après
la décision d’Hitler de fixer le jour "Y" au
26 août. De même, la Kriegsmarine déploie ses unités.
Le 19 août, les U-boot quittent Wilhelmshaven pour se poster dans
l’Atlantique et près des Iles Britanniques. Tour à
tour, le Graf Spee, le Deutschland, le Scharnhorst, le Gneisenau, l’Admiral
Scheer et d’autres navires de moindre tonnage sont envoyés
dans l’Atlantique et en Mer du Nord pour attaquer les convois
des forces de l’Ouest en cas de déclaration de guerre.
Le cuirassé Nuremberg est désigné vaisseau amiral
pour les opérations en mer Baltique. Le cuirassé Schleswig-Holstein
est envoyé en visite diplomatique à Dantzig quelques jours
avant la fin août, où il devra rester en mouillage jusqu’au
déclenchement des hostilités. D’autres navires,
en nombre réduit toutefois, se placent à proximité
de Gdynia et Hela, prêt à bombarder les défenses
côtières. A la veille du 26 août, tout est prêt
pour que la machine de guerre allemande enclenche la première
vitesse et fonde sur la Pologne.
Le 25 août, Hitler annula son ordre d’attaque pour le lendemain,
à cause de la réaffirmation par les Anglais de leur soutien
aux Polonais. Seulement, des unités avaient déjà
commencés leurs mouvements vers la frontière et les commandants
d’unité eux même durent parfois aller arrêter
leurs hommes avant qu’il ne soit trop tard. Une unité ne
fut pas prévenue à temps et s’empara d’une
position polonaise. Ils durent se retirer en apprenant le changement
d’ordre, pour finalement reprendre une deuxième fois cette
position seulement quelque jour plus tard !
Au final, le jour "Y" fut déplacé au 1er septembre,
et l’heure du lancement des hostilités à 4h45.
La "Blitzkrieg"
et l’apathie alliée
Alors qu’à l’heure H - 5 minutes les bombardiers
de la Luftwaffe commencent à anéantir les bases aériennes
polonaises, les premières heures du conflit se jouent sur mer.
Le cuirassé Schleswig-Holstein ouvre le feu sur la forteresse
de Westerplatte dans le port de Dantzig, à très courte
distance de l’ouvrage défensif, causant d’importants
dégâts. Néanmoins les polonais réussiront
à repousser le débarquement qui suivit. Dans le port de
Gdynia, dont le minage a été annulé au dernier
moment, le destroyer polonais Wicker est coulé par des unités
navales légères. Rapidement, la Kriegsmarine met en place
un blocus de tous les ports. Les cinq sous marins polonais réussissent
à fuir : 3 en Suède, 2 en Grande-Bretagne.
Sur terre, après de courtes escarmouches avec les gardes frontières,
les troupes de la Wehrmacht entrent en Pologne. Les premières
hésitations des hommes exposés au feu pour la première
fois ne seront corrigée qu’après les premiers engagements
plus important, tout comme les quelques incidents de tirs fratricides.
Dans le secteur du Heeresgruppe Nord, l’avancée se fait
dans un brouillard épais. La 3. Armee ne rencontre dans un premier
temps que peu de problèmes. La brigade Eberhard prend Dantzig
aisément, le XXI. Korps progresse vers Grudziadz, le I. Korps
et et le "Korps Wodrig" vers Varsovie. Ces deux derniers sont
violement arrêtés dans l’après midi par les
8ème et 20ème divisions d’infanterie polonaises
ainsi que la brigade de cavalerie "Novogrodsha" dans la zone
de Mlawa, dont les fortifications abritent de puissantes armes anti-char
qui infligeront d’important dégâts aux "panzers"
allemands.
La 4. Armee se trouve face à l’armée Pomorze. Des
éléments de la brigade de cavalerie "Pomorska"
sont engagée dans la matinée, mais à la mi-journée
il apparaît clair au commandement allemand que l’adversaire
cherche à se retirer vers le sud-est derrière la rivière
Brda. En fin d’après midi, des escarmouches avec la 9ème
division d’infanterie éclatent sporadiquement.
Le 2 septembre, la ville de Tczew est prise par une unité du
génie, "Gruppe Medem", qui n’arrive pas à
sauver les ponts de la ville, placée stratégiquement sur
la Vistule, réduisant les possibilités pour traverser
à Gniew et Marienwerder. Dans les alentours de Grudziadz, le
XXI. Korps subit une violente contre-attaque, l’empêchant
de prendre la ville. Il use néanmoins de son artillerie pour
bloquer les ponts et empêcher plus d’unités polonaises
de renforcer leurs positions, et le Generalleutnant von Falkenhorst
prépare l’assaut pour le lendemain. Le I. Korps n’avance
pas plus face à Mlawa, mais le " Korps Wodrig" effectue
une percée à l’est de la ville fortifiée.
Il est rapidement renforcé par la Panzer-Division "Kempf".
Le plan de la 3. Armee pour prendre Varsovie est revu. Il faut d’abord
prendre la forteresse en l’enveloppant grâce aux troupes
du Generalleutnant Wodrig, couvert par la 1. Cavalerie-Brigad. Ce point
d’appui détruit, les deux corps reprendraient leur marche
vers le sud.
La 4. Armee franchit la rivière Brda dans la matinée,
et le XIX. Korps arrive à quelques kilomètres de la Vistule.
Cette avance fut trop rapide, les lignes de ravitaillement ne pouvant
suivre la marche des blindés de Guderian. Les unités de
soutien doivent à leur tour combattre les troupes polonaises
qui se replient encore pour rejoindre les chars en panne ! Les Polonais
ne peuvent à aucun moment user de cet avantage. L’avancée
de ce jour enferme dans le Corridor les 9ème et 27ème
divisions d’infanterie, ainsi que la brigade de cavalerie "Pomorska".
Les nombreuses tentatives des jours suivant visant à sortir de
ce piège se solderont par la destruction de ces unités.
Il sera même rapporté des affrontements entre les lanciers
polonais et des blindés du XIX. Korps . La 10. Panzer-Division
est détachée de la réserve de l’armée
dans la fin de la journée du 2 septembre et part immédiatement
en Prusse Orientale.
Le lendemain, le XXI. Korps lance son offensive contre Grudziadz. Alors
que la Luftwaffe paralyse littéralement la 4ème Division
d’Infanterie, le corps avance vers la 16ème Division d’Infanterie
qui occupe la ville. Les deux forces polonaises réussissent à
se retirer en bon ordre malgré de lourdes pertes, et ce grâce
aux combats de l’arrière garde dans l’enceinte même
de la ville.
Le I. Korps envahie Mlawa avec l’appui du "Korps Wodrig",
lui-même gêné dans sa progression par la brigade
de cavalerie "Mazowiecka".
Dans le secteur de la 4. Armee, alors que la 207. Infanterie-Division
accule les forces polonaises vers Gdynia, le 3. Korps attaque la 15ème
Division d’Infanterie au nord de Byd-goszcz. Les deux armées
font jonction à Nowe Swiecie dans la journée. Nous sommes
alors le 3 septembre.
Invasion
allemande
Au sud, les premières heures de la guerre se feront sous un ciel
plus clément. Le gros des forces rencontre peu de résistance,
et à la fin de la journée certaines unités auront
avancé de près de 25 kilomètres à l’intérieur
des terres, malgré la destruction de nombreux ponts et portions
d’autoroute par les polonais.
La nouvelle "guerre de mouvement" fait son œuvre ici
plus qu’ailleurs. Les chars doublent les unités d’infanterie
adverses et laissent leurs propres fantassins s’en charger, tout
en étant appuyé par les bombardiers en piqué de
la Luftwaffe.
La 8. Armee reporte des contacts entre le XII. Korps et la 10ème
Division d’Infanterie (Armée Lodz) se repliant vers Kalisz,
ainsi qu’entre le X. Korps et les 14ème et 25ème
Division d’Infanterie et la Brigade de Cavalerie "Wielkopolska"
se retirant vers le nord et l’est.
La 10. Armee a quant à elle rencontré sur le front du
XV. Korps la Brigade de Cavalerie "Krakowska", la 7ème
Division d’Infanterie en face du IV. Korps, les 28ème et
30ème Division d’Infanterie en face du XVI. Korps et la
Brigade "Wolyinska" face au XI. Korps. De fait, ces forces
ne mènent qu’un combat d’arrière-garde pour
permettre au gros des troupes de se replier.
Les combats les plus durs de la première journée de la
guerre pour le Heeresgruppe Süd ont lieu dans le secteur de la
14. Armee. En effet, le XVII. Korps, qui part de la frontière
Moravienne, se retrouve face à l’importante résistance
de la 21ème Division de Montagne qui occupe la Passe de Jublunka.
Elle n’est libérée qu’à la fin de la
journée. Appuyé par le VIII. Korps sur sa gauche, le corps
repousse les 5ème, 6ème et 23ème Divisions d’Infanterie
qui doivent se retirer en direction de Cracovie.
Le XVIII. Korps emmène quant à lui ses 2. Panzer-Division
et 4. Leichte-Division vers Novy Targ et en chasse la Brigade de Cavalerie
Blindée "Rzeszow". Des villages frontaliers sont occupés
par les troupes slovaques avant la fin de la journée.
L’attaque reprend le lendemain à l’aube. La 8. Armee
traverse la rivière Prosna et se retrouve face à deux
divisions Polonaises, composées de réservistes tout justes
rappelés. La 10. Armee se heurte aux défenses de Czestochowa
et doit l’éviter par le nord pour atteindre le fleuve Warta,
au-delà duquel l’attendent plusieurs divisions polonaises
extraites de la réserve générale. L’aile
gauche de la 14. Armee se trouve face à l’extrémité
de la ligne de défense qui se met en place : Katowice et Mikolow
résistent aux assauts du VIII. Korps. Les XVII. et XVIII. Korps
se rejoignent au nord de Novy Targ.
Le verrou de Czestochowa saute avec la prise de la ville au matin du
3 septembre. La 10. Armee établit ainsi plusieurs têtes
de pont sur la Warta. La 14. Armee passe à travers les défenses
polonaises sur son aile gauche et commencent une avancée rapide,
poussant l’adversaire à se retirer très rapidement,
gagné par la désorganisation.
Il y a lieu de faire un point sur la situation au matin du 4 septembre.
Rundstedt estime à ce moment que l’Armée Poznan
est incapable de lancer une attaque importante sur le flanc gauche,
exposé, de la 8. Armee. La 10. Armee rend compte de la quasi-destruction
de la 7ème Pivision d’Infanterie polonaise, et la capture
de 1000 prisonniers dont le commandant de la division. La brigade de
cavalerie "Krakowska" semble avoir subit de lourdes pertes.
En conséquence, l’avance reprend à grande vitesse.
Les Panzers du XVI. Korps dépassent Radomsko et atteignent la
rivière Pilica, les flancs couverts par les "Leichte-Division"
des XI. et XV. Korps. Dans la journée, la 14. Armee rend compte
de la destruction de la 6ème Division d’Infanterie et d’un
retrait général des forces polonaises vers Cracow et l’est
du pays. Le même jour, le XXII. Korps prend la place du XVIII.
Korps à la tête des 3. Gebirgsjaeger-Division, 2. Panzer-Division
et 4. Leichte-Division pour avancer au nord de Novy Targ.
Deux nouvelles divisions de montagne sont affectées au XVIII.
Korps qui doit entrer en Pologne plus à l’est.
Le 5 septembre vit un nouveau gain de terrain important pour les troupes
allemandes. Pour compenser l’élargissement du front du
X. Korps, des troupes de gardes frontières et de divisions d’infanterie
de réserves sont affectée à la couverture du flanc
gauche de la 8. Armee qui s’enfonce toujours plus loin dans les
plaines polonaises. Cet ensemble prend le nom de "Gienanth Gruppe".
En effet, l’Armée Poznan a été assez peu
touchée par les combats et dispose donc d’une force importante
menaçant encore l’action du Heeresgruppe. La 10. Armee
traverse le Pilica et le seul obstacle qu’il reste entre ses Panzer-Divisions
et la capitale est une ligne de défense composée à
la hâte par des unités de réserve. La 14. Armee
continue son avancée vers Cracow, le XXII. Korps se dirigeant
vers la rivière San en se déplaçant au sud de la
Vistule.
Mais le 6, Rundstedt estime que l’Armée Poznan peut le
menacer. L’OKH n’accède pas à sa demande de
renforts en cavalerie pour effectuer des reconnaissances, mais affecte
deux divisions d’infanterie tirées des réserves
pour renforcer le flanc gauche de la 8. Armee. L’avance de la
10. Armee est rendue plus difficile par la situation des forces polonaises
: face à elle, ce sont les défenseurs de Varsovie, et
sur ses flancs arrivent les troupes qui battent en retraite. Les renseignements
indiquent que des forces importantes se rassemblent à Radom.
Il est donc décidé que, pendant que la 8. Armee mènerait
une attaque de front sur les polonais de Lodz, la 10. Armee encerclerait
ceux qui se rassemblent à Radom. A la 14. Armee est assignée
la tâche de détruire les forces qui fuiraient à
l’est de la Vistule.
Soldats
polonais
Retournons au
nord de la Pologne où le Heeresgruppe Nord a continué
son travail de destruction des forces polonaises.
Après avoir fermement établi le contrôle de Grudziadz
le 4 septembre, les troupes du génie du XXI. Korps réparent
les ponts sur la Vistule pour renforcer le contact avec la 4. Armee.
A l’est du front, le I. Korps et le Korps Wodrig reprennent leur
avancée au sud de la désormais silencieuse forteresse
de Mlawa.
Les quelques nids de résistance qu’ils rencontrent ne les
ralentissent qu’à peine.
A la base du Corridor, le XIX. Korps remonte la Vistule afin de cueillir
les restes de l’armée polonaise qui tente d’échapper
au piège allemand. Les autres troupes de la 4. Armee traversent
la Vistule et détruisent les éléments qui passent
à travers les mailles du filet blindé, et repoussent la
15ème Division d’Infanterie au nord de Bydgoszcz.
Von Bock avait alors pour objectif de faire basculer la 4. Armee sur
la gauche de la 3. Armee et d’effectuer un grand mouvement enveloppant
à l’est de Varsovie. Mais un ordre de Von Brauchitsch contrarie
ces projets dès le 5 septembre, demandant à Von Bock de
ne pas aller plus à l’est que la ligne Ostrow Mazowiecka
– Varsovie, étant donné la situation allemande à
l’ouest. Ainsi, seul le XIX. Korps sera transféré
à l’est tandis que le reste de la 4. Armee continuera sur
sa lancée vers Varsovie.
Le XXI. Korps, après être revenu se regroupe en Prussie
Orientale, est recomposé et renommé en Gruppe Falkenhorst,
du nom de son commandant, et lui est affecté en plus la 10. Panzer-Division
ainsi qu’une brigade de réservistes prussiens. Le corps
est lancé le 7 sep-tembre au sud de Lomza. Derrière lui
se reforme rapidement le XIX. Korps qui s’élance le 9 septembre
après avoir pris le contrôle de la 10. Panzer-Division.
Seulement, la zone délimitée par l’OKH est trop
étroite pour laisser manœuvrer la masse de blindés.
Le Heeresgruppe Nord demande donc une nouvelle limite, plus à
l’est. La requête est accordée, et la ligne choisie
est Minsk-Mazowiecki-Siedlce.
Malgré un flanc exposé à la brigade de cavalerie
Podlaska et à d’autre unités polonaises, la 10.
Panzer-Division traverse le jour même la rivière Narew,
suivie le lendemain par la 20. Infanterie-Division (Motorisiert). Entre
temps, le Gruppe Falkenhorst a repris sa dénomination XXI. Korps.
Il progresse sur la droite de Guderian mais pas assez vite, et rencontrant
trop de résistance, pour suivre le pas. Le 10 septembre à
Zambrow, et malgré l’avoir repoussé une première
fois, il tombe sur une forte résistance de la 18ème Division
d’Infanterie. La 10. Panzer-Division est obligée de venir
à son aide et inflige de lourdes pertes aux Polonais. L’avance
reprend avec la 3. Panzer-Division qui a enfin rejoint le corps, qui
traverse la Nurzec, un affluent de la rivière Bug à l’ouest
de Bielsk. Le lendemain, Von Bock affecte le Korps Brand à la
protection du flanc gauche du XIX. Korps et la 2. Infanterie-Division
(motorisiert) s’élance à son tour rejoindre Guderian.
Au même moment, le I. Korps et le Korps Wodrig traversent le Bug.
Le 12 septembre, un ordre émane de l’OKH : la 3. Armee
devra tourner sur sa droite et se diriger vers Varsovie tandis que la
4. Armee pourra enfin effectuer son mouvement et établir un front
au sud-est de la capitale.
Le 14 septembre, les éléments avancés de la 10.
Panzer-Division atteignent Brzesc . La 3. Panzer-Division s’établit
à l’est du corps et reconnaît la zone jusqu’à
Kobryn. L’attaque initiale repoussa les polonais au cœur
de la ville, dans la Citadelle, mais celle-ci ne put être prise
par une attaque surprise, le lendemain.
Ce jour là, le I. Corps captura 8 000 soldats polonais qui fuyaient
Varsovie.
Le 16, la 10. Panzer-Division et la 20. Infanterie-Division (motorisiert)
attaquent conjointement la citadelle et prennent la ligne de défense
externe. La forteresse ne sera totalement prise que le lendemain, par
l’assaut d’un régiment d’infanterie qui profita
d’une tentative de sortie des Polonais. 600 prisonniers furent
pris. Pendant ces opérations, la 3. Panzer-Division a progressée
vers le Sud jusqu’à Wlodowa. La prise de la cité
marque la fin des combats pour le XIX. Korps.
Mais retournons
dix jours en arrière, dans le secteur du Heeresgruppe Süd
du Generalfeldmarschall von Rundstedt. Le 7 septembre au matin commence
donc la deuxième phase de la campagne. L’objectif du groupe
d’armée est de détruire les forces polonaises restantes
dans l’ouest du pays et d’établir le siège
de Varsovie, en jonction avec les forces du Heeresgruppe Nord. Trois
cibles majeures s’offrent aux trois armées de Rundstedt
: Kutno et Radom, où se rassemblent les dernières forces
polonaises, et Lwow, où est stationnée une importante
garnison.
La 8. Armee défait à Lodz l’armée polonaise
qui s’y trouvait. Cette victoire lui permet de considérablement
avancer dans les plaines polonaises, et elle se trouve face à
la nécessité d’être renforcé pour soutenir
ses flancs étendus. Les XI. et XVI. Korps passent donc sous son
commandement, détachés de la 10. Armee.
Le premier couvrira la droite de le l’armée, tandis que
le second est déjà en pointe du dispositif : la 4. Panzer-Division
atteint les faubourgs de Varsovie le 8 septembre et la 1. Panzer-Division
a établi une tête de pont sur la Vistule. Mais ce renforcement
ne suffira pas à protéger les flancs d’une attaque
polonaise : le 10 septembre, la 30. Infanterie-Division, qui tient un
front de plus de 32km est attaquée en force par deux divisions
d’infanterie et deux brigades de cavalerie. Cette division appartient
au X. Korps qui doit sécuriser le flanc nord de l’armée.
Ce n’est qu’en mobilisant l’intégralité
du corps que la déroute sera évitée.
Le mirage de succès devient l’aube du désastre pour
les Polonais : l’attaque qui vient d’échouée
a affaibli leurs défenses de Kutno, et les Allemands ne manqueront
pas d’en profiter.
Au même moment, la 10. Armee essaie de se débarrasser d’une
grosse épine plantée dans le pied : Radom. Dès
le 8 septembre, les divisions blindées ont pris pied au nord
de la rivière Pilica, et l’armée peut donc se préparer
à réduire à néant les forces polonaises
station-née à Radom par une pince nord-sud. Celles-ci
sont composée des 3ème, 19ème et 29ème Divi-sion
d’Infanterie de la réserve générale, de la
Brigade de Cavalerie "Krakowska" et de la 7ème Division
d’Infanterie de l’Armée Cracovie et de la 12ème
Division d’Infanterie. Cette dernière est la seule à
être intacte, les autres sont très loin de disposer de
leur force théorique.
Le XIV. Korps attaque donc par le nord, le XV. Korps par le sud. Le
IV. Korps soutient l’attaque par l’ouest et le sud-ouest.
La bataille commence au soir du 8 septembre, quand les premières
unités blindées entrent en contact avec les polonais.
La résistance est dure et efficace, et il faudra trois jours
à la 10. Armee pour obtenir la reddition des polonais, et faire
60 000 prisonniers. Néanmoins, des petites unités de l’ordre
du régiment réussirent à fuir et, en s’installant
dans les grandes forêts, offrirent une résistance sporadique
qui cloua sur place quelques divisions pendant de nombreux jours.
Ainsi, le 11 septembre, ordre est donné par l’OKH à
la 10. Armee de diriger son IV. Korps vers Lublin, pour soutenir l’avancée
de la 14. Armee. Le 13, celle-ci cèdent à la 10. Armee
les VII. et VIII. Korps, chargés de prendre Bilgoraj puis de
maintenir leur mouvement vers Lublin. Ces deux forces durent combattre
longuement pour prendre leur premier objectif avant de pouvoir entrer
dans Lublin uniquement le 17 septembre. Le IV. Korps pris du retard
en affrontant les Polonais à Krasnik les 14 et 15 septembre.
Ce même jour, la 8. Armee rend à la 10. Armee le contrôle
des XI. et XVI. Korps, afin de pouvoir se consacrer à la réduction
de la poche de Kutno. Sont réunies ici les forces sui-vantes
: les 14ème, 17ème, 25ème et 26ème Division
d’Infanterie de l’Armée Poznan, les 2ème,
10ème, 13ème, 28ème et 30ème DI de l’Armée
Lodz, les 4ème, 15ème et 16ème DI de l’Armée
Po-moze ainsi que les Brigades de Cavalerie "Wielkopolska",
"Kresova" et "Wolynska". Ce sont principalement
des unités déjà en grande partie défaites,
très incomplètes.
Le 17 septembre, l’attaque est lancée. Les 6 corps réunis
par la 8. Armee encerclent Kutno de la Vistule à Bzura, et la
Luftwaffe lance une série de lourdes attaques aériennes
achevant de désorganiser les défenses polonaises.
40 000 prisonniers sont faits, tandis que ceux qui peuvent s’échapper
sont pris par la 10. Armee qui bloquait la seule direction de sortie,
faisant 12 000 prisonniers de plus.
Cette dernière s’est d’ailleurs consacrée
depuis le 15 septembre à établir le siège de Varsovie.
Mis à part les forces stationnées entre Kutno et Varsovie,
que nous venons de voir en action, une division d’infanterie fait
dors et déjà face au sud de la ville.
Dans le secteur de la 14. Armee, l’avance est difficile. Le 10
septembre, les XVII. et XVIII. Korps ont pu traverser la rivière
San aux alentours de Przemysl, forçant la 11ème Divi-sion
d’Infanterie a s’y réfugié. Les deux corps
avancèrent rapidement sur Lwow où le Haut-Commandement
Polonais s’était établit quelques jours auparavant.
Le Gruppe "Schoerner" de la 1. Gebirgsjäger-Division
atteint les fortifications de la ville le 12 septembre et se heurte
à la résistance des 12 000 hommes qui y sont abrités.
La division s’installe alors au nord et à l’ouest,
bloquant le contact avec Przemysl. Le Gruppe "Schoerner" prend
les hauteurs de Zboiska qui couvrent le nord et le nord-est de la cité.
D’autre Kampfgruppe terminent d’installer le siège
de la ville qui sera effectif le 14 septembre. La veille, les XVII.
et XXII. Korps sont envoyés vers le nord-est en direction de
Wlodzimierz et Hrubieszow pour joindre les troupes du Heeresgruppe Nord
à l’est de rivière Bug.
Entre temps, Przemysl a été assiégé, et
tombe le 15 septembre. Lwow tient toujours, et alors que le siège
continue, les champs de pétroles au sud sont sécurisés.
Deux jours après, le siège dure toujours quand arrive
une nouvelle mauvaise surprise pour la Pologne.
Tank vickers
L’intervention
russe
Le pacte germano-soviétique signé le 23 août comportait
une clause secrète : la définition des "sphères
d’influence" respectives des deux pays sur la Pologne, les
pays baltes et les pays scandinaves. Ainsi, sont "donnés"
à l’URSS la Finlande, l’Estonie et la Lettonie, ainsi
qu’une partie de la Pologne délimitée à l’ouest
par les rivières Narew-Vistule-San. Hitler aurait ainsi tout
les droits sur la partie restante, ainsi que sur la Lituanie et la Norvège.
Mais le 17 septembre, Staline décide de prendre sa part plus
tôt que prévu et lance l’Armée rouge contre
les frontières polonaises, sous prétexte de défendre
les peuples biélo-russes et ukrainiens opprimés par le
gouvernement.
Ainsi, à la surprise du monde entier, allemands y compris, 500
000 soldats russes accompagnés de 5 000 chars entrent en Pologne.
Malgré les précautions prises par l’OKH, certaines
divisions allemandes ont déjà avancé à l’est
de la ligne de démarcation, comme le XIX. Korps. Celui-ci subira
d’ailleurs des pertes, quand un pont que ses troupes traversaient
est bombardé par un avion russe. D’autres accidents sont
signalés.
L’intervention russe presse Hitler à faire tomber Varsovie.
Il veut mettre fin au siège de la ville avant leur arrivée,
pour les impressionner. De multiples "bombardements" de propagande
sont donc organisés : des feuillets expliquant à la population
qu’il ne fallait pas résister, et qu’aucun mal ne
leur sera fait, demandant la reddition se la garnison… Mais c’est
sous-estimer la volonté des militaires et du peuple polonais.
Varsovie ne tombera pas sans combats.
Le 16 septembre, la 3. Armee proposa une trêve de 12h pour permettre
l’évacuation des civils et négocier une reddition
sans condition de l’armée. Cette dernière fut refusée
par les polonais, et, alors que la population commençait à
évacuer, un incident eut lieu. L’artillerie polonaise n’avait
apparemment pas eu le temps d’être mise au courant de la
trêve et continua ses opérations de bombardement. En réponse,
l’artillerie de la 3. Armee reprit le bombardement de Varsovie.
Bien que le tir de barrage ne durât pas longtemps, cela fit perdre
beaucoup de crédibilité à la propagande allemande.
Le 18, le siège reprend. Le 20, les Stuka de la 1. Luftflotte
bombardent les usines et les ponts et les unités au sol effectuent
des reconnaissances des abords de la ville. A l’intérieur
de la ville, la situation est encore bonne.
Les communications et le réseau électriques sont encore
intacts et le moral est bon, sous le commandement du Général
Rommel, ancien commandant de l’Armée Lodz. Les munitions
sont présentes en quantité, et une milice importante a
pu être levée. Seule la situation alimentaire est préoccupante.
La colonie diplomatique de Varsovie est évacuée le 21
septembre à travers les lignes allemandes. Le 22, il est décidé
que seul l’ouest de la capitale serait envahi, l’est étant
laissé aux bons soins des soviétiques. L’OKH désigne
la 8. Armee pour mener à bien cette tâche, avec l’appui
de la 3. Armee.
Son commandant, le General Blaskowitz reçu l’ordre de ne
pas laisser sortir la population avant l’assaut, afin de laisser
la situation des assiégés empirer. Celui-ci eût
lieu le 26, où les deux premières lignes de défense
furent prises, sous les bombardements de la 3. Armee. L’alimentation
électrique de la ville fut coupée, ainsi que les communications.
Hitler décida que la ville devait être prise avant le 3
octobre, jour prévu de l’arrivée des Soviétiques
à proximité. Ce soir là, les allemands reçurent
un message du Général Rommel, demandant une trêve
de 24h pour négocier une reddition. Cette demande fut rapportée
à l’OKH qui répondit que seule une reddition inconditionnelle
pourrait être acceptée. La trêve n’eût
donc pas lieu et les bombardements continuèrent. Le matin suivant,
le Général Kutrzeba se présenta et annon-ça
la reddition de la garnison au nom du Général Rommel.
A 14h, le 27 septembre, les hostilités cessèrent. 140
000 soldats déposèrent les armes. 16 000 d’entre
eux étaient blessés. La faim avait commencé son
œuvre, et l’obligation de boire l’eau de la Vistule
faisait poindre un risque d’épidémie de typhoïde.
En dépit de la reddition de la capitale, la forteresse de Modlin
continuait de résister aux violentes attaques de la 3. Armee.
Le Général Thomee décida de se rendre, la ville
n’étant plus alimenté en eau. 24 000 polonais dont
4 000 blessés se rendirent le 28 septembre à 7h30, bien
que les termes de la reddition ne soient signés que le lendemain.
Le dernier point de résistance polonais était situé
au nord de Dantzig, dans la très étroite péninsule
de Helag. A partir du 21 septembre, les bombardements de la Luftwaffe
et des cuirassés Schleswig-Holstein et Schlesien mettent à
mal la garnison. L’assaut final est prévu pour le 2 octobre,
mais la veille en fin d’après midi, le Vice-Amiral Unru
accepte de se rendre. 5 000 hommes et 41 pièces d’artilleries
sont capturés.
Entre temps, les troupes situées à l’est de la ligne
de démarcation avaient du quitter leur position, quitte à
abandonner un siège déjà installé comme
ce fut le cas à Lwow. Le 23 septembre et du 4 au 6 octobre, la
10. Armee qui battait en retraite derrière cette ligne fut at-taquée
par ce qui restait des forces polonaises. Dans les deux cas, à
Zamosc et à Kock, l’ennemi fut très rapidement encerclé
et du se rendre.
Bilan
On peut considérer que la campagne de Pologne s’achève
au 6 octobre, quand le "dernier carré" polonais a fait
le coup de feu. Une résistance active continua longuement, motivée
par les nombreuses petites unités dispersées dans les
forêts du centre du pays.
Cette campagne de 36 jours ne fut pas de tout repos pour l’armée
Allemande, contrairement à une croyance populaire.
Il en coûta à la Wehrmacht 8 082 officiers et hommes de
troupes, 27 278 autres furent blessés, 5 029 furent portés
disparus. 270 chars furent détruits, dans les proportions suivantes
:
89 Panzer I, 83 Panzer II, 26 Panzer III et 19 Panzer IV, soit l’équivalent
d’une Panzer-Division entière ! Approximativement 400 avions
furent détruits. Et c’est sans compter les innombrables
réparations nécessaires sur tout les véhicules.
694 000 hommes furent fait prisonniers, sur les 800 000 que comptaient
les défenses polonaises. Les 106 000 restant furent tués,
capturés par les Russes, purent fuir en Hongrie ou en Roumanie,
ou plus simplement réussirent à se cacher sur leur sol.
Les Allemands capturèrent 3 214 pièces d’artillerie,
16 500 mitrailleuses et 1 700 mortiers.
Notes
bibliographiques
Feld Marschall Erich von Manstein, Lost Victories – The War Memoirs
of Hitler’s Most Brilliant General
Von Tippelkirsch, History of the Second World War
Oberst Hermann Schneider, Militärwissenschaftliche Rundschau
Von Tippelkirsch, History of the Second World War